VENISE
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 Etage Inférieur - Le Salon-Bibliothèque

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Iago degli Albizzi
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Iago degli Albizzi


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MessageSujet: Re: Etage Inférieur - Le Salon-Bibliothèque   Etage Inférieur - Le Salon-Bibliothèque - Page 2 PerleSam 17 Mai - 1:32

Iago regarda son café tourner dans sa tasse, savourant le plaisir de discuter avec quelqu’un qui ne s’offusque pas de son comportement. Il prenait le temps de réfléchir à sa réponse, les sourcils légèrement froncés.

"Je n’en suis pas très sûr. Della Lonza il me semble. Je passais du côté du palais Adorasti. Parce que… par hasard, bien sûr. Et en passant, j’ai entendu une musique absolument remarquable.
Cela est rare, n’est-ce pas. Nous sommes plus habitués à entendre les grincements sinistres de la Dame Donatella qu’autre chose… Mais là… et bien, simplement, cela valait la peine que je m’arrête sous les fenêtres pour écouter."

Iago jeta un coup d’œil en direction de Muzio. Il n’avait pas envie de s’attarder sur son faux-pas verbal qui trahissait le fait que, depuis à peu près un mois, il tournait autour du palais d’Elio sans oser aller le saluer, et cela pour une raison obscure et qui lui échappait complètement. Mais il voulait tout de même être sûr de s’exprimer clairement.

"Et donc, j’écoutais, jusqu’à ce que… brusquement, et bien le clavecin chavire. Je veux dire accord plaqué de travers, cafouillage, de nouveau accord désespéré, là sur les cordes graves, et puis plus rien. Je pense que c’est le claveciniste qui a dû parler après, très bas, je ne comprenais pas vraiment, quelque chose comme « plus jamais ». Quelque chose d’angoissé voyez-vous ?
Et puis ensuite, une voix de femme, plus claire, nommant della Lonza si j’ai bien entendu, et puis une histoire un peu sotte d’émotion décuplée parce qu’il serait un artiste.
Je n’ai pas écouté plus, hein, je suis parti."

Il avait ajouté la fin presque comme un enfant se défendant d’écouter aux portes. En fait, il avait été tellement surpris d’entendre cette scène (il ne s’y attendait tellement peu, croyant simplement assister incognito à un concert improvisé) qu’il s’était senti terriblement gêné, presque honteux, et qu’il avait filé directement vers la maison du médecin.

"Mais c’était triste voyez-vous ? Et donc je ne pouvais m’empêcher de me demander ce qui pousse un homme à perdre autant le contrôle de tout. Je ne voyais rien, mais ce bégaiement du clavecin, le silence… tout cela ne paraissait pas du tout ridicule. Simplement… cela donnait envie de savoir pourquoi."

Iago finit sa tasse d’un trait et sourit, légèrement ironique.

"A vrai dire, peut-être était-ce simplement parce que cela semblait un silence sincère. Pour une fois…"
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Muzio Barrozi
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Muzio Barrozi


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MessageSujet: Re: Etage Inférieur - Le Salon-Bibliothèque   Etage Inférieur - Le Salon-Bibliothèque - Page 2 PerleSam 17 Mai - 17:10

En fait, Muzio avait une idée très précise sur ce qui poussait Iago à rôder autour de la Ca'Adorasti sans y pénétrer vraiment. Une petite fille à quatre prénoms qui devait dormir paisiblement à cette heure n'était pas, selon lui, étrangère au phénomène. Le médecin se gardait bien néanmoins de dévoiler ses pensées à Iago. Il écouta, un peu étonné, le récit inhabituellement dépourvu de cette ironie mordante qui habitait le gentilhomme.

A son tour, Muzio prit du temps avant de répondre. Il avait décelé assez aisément cette sensibilité accrue chez Danilo della Lonza, mais les faits que rapportait Iago, conjugués au ressenti de ce dernier, supposaient sans doute autre chose qu'une émotion d'artiste.


« Il est très aisé de perdre le contrôle de soi... Vous savez, il existe des points de rupture dans le coeur des hommes, et la musique a ce pouvoir de les faire affleurer, même parfois chez ceux qui les ont enfouis très profondément. D'une part naturellement, parce que... Je ne sais pas pourquoi. Il me semble que la musique nous renvoie à ce qui nous touche le plus, d'une manière intrinsèque. Elle est idéal et passions par essence. Et d'autre part, par le biais des souvenirs qu'elle réveille. Quelques notes, parfois, ou une tonalité, ramènent brutalement le passé que l'on aurait voulu oublier, la présence d'un être aimé et perdu... »

Il se tut un instant. Il n'avait pas adopté un ton larmoyant ni un ton docte. Comme toujours lorsqu'il parlait avec Iago, il progressait à haute voix dans sa réflexion, et se découvrait souvent des pensées qu'il n'avait jamais pensé à déterrer. Il avait perçu combien la mort de Matteo avait bouleversé Iago, et peut-être ce dernier comprendrait-il mieux qu'il ne l'aurait fait qu'auparavant. Tout n'était pas à moquer dans l'émotion des hommes.

« Et ce panachage d'absolu et d'induit que vous impose la musique peut être tout à fait insupportable. C'est le point de rupture, exprimé plus ou moins violemment selon chacun. »

De nouveau il se tut, pensif, puis reprit d'un ton qu'il voulait plus léger:

« Mais tout n'est pas forcément à disséquer. Les causes du point de rupture qui a éveillé votre curiosité restent la proie de votre imagination ! »

Il se leva rapidement, se dirigea vers un buffet et revint avec une boîte de confiseries qu’il tendit à Iago avant de se rasseoir. Ses traits avaient quitté toute gravité.

« A mon tour, j’ai besoin de votre avis. Sur trois questions, en fait. Mais je commence par les plus légères… Questions mondaines, excusez-moi. »

Vu comme cela, les friandises pouvaient presque se comprendre comme une demande de pardon, à l'avance, afin d'échapper aux foudres ennemies de la frivolité que lancerait sans doute Iago.

« Un : que penser de la comtesse Accorti ? Et deux… » Un léger soupir s’échappa de ses lèvres. « Serai-je censé donner le bras à Donatella Visconti ce soir à la Fenice où elle m’a invité, ou est-ce tout à fait inconvenant ? »
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Iago degli Albizzi
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MessageSujet: Re: Etage Inférieur - Le Salon-Bibliothèque   Etage Inférieur - Le Salon-Bibliothèque - Page 2 PerleJeu 22 Mai - 13:06

Iago avait écouté les paroles du médecin avec grande attention. Elles étaient toujours très sages. Le paradoxe de l’affaire était que la plupart du temps, Iago s’était déjà fait, pour lui-même, toutes ses réflexions. Il n’apprenait rien de fondamentalement nouveau.
Mais la façon calme et posée qu’avait Muzio de parler donnait plus de poids à ces réflexions.
C’était la métamorphose d’un insecte affolé par la lumière en une roche bien polie. Très agréable.

Il se contenta donc de reprendre la parole après la conclusion du médecin, faite d’un ton plus léger.


"Pas mon imagination, cher ami. Non pas. Cela reste de la curiosité, curiosité qui cherche des faits. L’imagination est la plus mauvaise des conseillères que nous pouvons trouver dans notre tête. Il ne faut surtout jamais faire appel à elle, car elle s’invite toute seule déjà bien trop souvent…"

Pendant ce temps, Barrozi était allé chercher une boite bien connue, et alors qu’il présentait sa nouvelle requête (qui fut accueillie d’un haussement de sourcil amusé), Iago s’appliqua à saisir une confiserie de l’air le plus détaché possible. C’est vrai. Car que deviendrait le monde s’il apprenait que l’acide Signor degli Albizzi était avait un faible pour les choses sucrées ? quelque chose de terrible sans doute…

La demande en elle-même surprit assez Iago pour stopper son mouvement, confiserie délicatement coincée entre le pouce et l’index, autres doigts élégamment figés dans les airs.


"A moi ? Vous me demandez, à moi, un avis sur les bonnes manières ? Diable, voilà qui est nouveau. Je vais m’efforcer de vous répondre, mais je commencerai par le plus facile, à savoir votre première question."

Il fit disparaître la confiserie entre ses lèvres et les traces de sucre de ses doigts avant de reprendre, très sérieux.

"La Comtesse Accorti est selon moi, maligne. Je ne trouve pas d’autre mot pour la décrire. Je ne saurais dire si son caractère "malin" va jusqu’à la malignité, mais en tout cas il est parfaitement du côté de la ruse. La première impression que j’ai eue d’elle était extrêmement négative. Pour ne pas dire angoissante.
Ce n’est pas quelqu’un d’honnête, d’entier. Elle donne l’impression d’avoir toujours quelque chose derrière elle. Comment dire. Un motif ultérieur, bien caché, et peut-être inavouable.

Mais elle a aussi une certaine radicalité de parole, une liberté d’esprit et une absence de soucis des conventions que je ne peux que louer.
Pour résumer, elle m’invite toutes les semaines à son salon, et me laisse dire tout ce que je veux, ce qui est assez remarquable. Mais qu’elle le fasse par accord avec ce que je dis ou par intérêt pour donner une réputation de non-conventionnel à son salon, voilà ce que je ne saurais dire.

Deuxième question…"

Et deuxième confiserie. C’est vrai, il ne faut pas se laisser abattre.

"Il n’y a rien d’inconvenant à donner le bras à une demoiselle, c’est même la moindre des politesses. Et votre respectabilité, cher Muzio Barrozi, empêche que l’on puisse attribuer la moindre inconvenance à vos gestes.

Evidemment, tout dépend également de ce que la baronne vous a écrit, ou vous a dit. "Voudriez-vous m’accompagner à la Fenice" indique que vous devez aller la chercher au palais Grazziano, et vous serez bien obligé de lui donner le bras pour la conduire au spectacle. "Me feriez-vous le plaisir de partager ma loge" signifie que vous la retrouver directement dans cette loge et vous n’aurez donc pas l’occasion, sans doute, de lui donner le bras."

Iago avait parlé d’un ton très docte (tellement docte d’ailleurs qu’il en était franchement ironique). Il l’abandonna aussitôt pour se redresser dans son siège les yeux pétillants de malice.

"Alors comme ça, la jeune baronne vous a invité, vous, très cher maître, à la soirée de la Fenice ? Et pas Monsieur Catanei ? Très intéressant, ça…"
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Muzio Barrozi
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Muzio Barrozi


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MessageSujet: Re: Etage Inférieur - Le Salon-Bibliothèque   Etage Inférieur - Le Salon-Bibliothèque - Page 2 PerleSam 24 Mai - 16:50

L'opinion de Iago degli Albizzi était sans aucun doute la plus avisée de la ville, et ce dans la plupart des domaines. C'était pourquoi Muzio la requérait régulièrement.

En l'occurrence, le portrait de la comtesse se révélait tout à fait intéressant, puisqu'il permettait au médecin de mieux analyser les impressions qu'il avait eues. Il se félicita d'avoir abordé avec elle le sujet des antidotes. La possible malignité et les éventuels motifs inavouables allaient dans le sens de la plus grande prudence.

La deuxième réponse amena un sourire amusé sur les lèvres de Muzio. L'emphase avec laquelle une profusion de renseignements était donnée ne laissait guère de doute quant aux pensées de son émetteur. Le médecin repensa malgré tout au billet reçu: "vous y accueillir"... Parfait, la question du bras était réglée.


« Je vous remercie, votre avis m'est précieux. Eh bien oui, à mon propre étonnement je bénéficie des faveurs de notre musicienne... »

Horrifié par ce qu'il venait de dire, Muzio finit sa tasse le temps de se donner une contenance, puis reprit le plus posément du monde:

« Je veux parler de cette invitation, évidemment. D'ailleurs, il est tout à fait possible que Demetrio Catanei en ait reçue une également. Dans le cas contraire, j'opterais pour penser que la baronne est victime du charme paralysant de son professeur de musique. »

A la réflexion, il penchait de plus en plus pour cette hypothèse. Un amusement quasi-paternel accompagnait cette idée.

« Enfin, tout le monde se souciera certainement bien davantage du spectacle que de la portée des invitations. » dit-il en partie pour s'en convaincre lui-même.

Dans l'entrée, un bruit de porte indiqua qu'Alessandro avait rempli sa mission et rentrait. Trop tard pour changer d'avis, de toute façon.


« Reprenez-vous du café, du thé, quelque chose ? Vous n'hésitez pas, n'est-ce pas ? Bon. »

Muzio hésita un instant. Sa troisième question arriverait comme un cheveu sur la soupe; pourtant il fallait toujours profiter des visites de Iago pour aborder avec lui les points qui lui tenaient à coeur.

« Je traîne depuis toujours ma troisième question, mais hier une lecture - il eut un geste vers sa bibliothèque - l'a formulée pour moi. Vous savez, bien souvent en médecine, il faut choisir une méthode atroce pour éviter la progression du mal... C'est le principe de l'amputation, par exemple. Mais ce principe est-il applicable au-delà de la médecine, dans le champ plus vaste de la vie et des choix qu'il nous faut faire ? Là est toute mon interrogation. Je vous le demande, Iago, (il lui échappait parfois, ce prénom, au milieu d'une discussion) le Bien est-il toujours le Bien quand il châtie le Mal ? »
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Iago degli Albizzi
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MessageSujet: Re: Etage Inférieur - Le Salon-Bibliothèque   Etage Inférieur - Le Salon-Bibliothèque - Page 2 PerleDim 25 Mai - 1:27

Iago eut un sourire amusé en entant le respectable médecin dire qu’il bénéficiait des faveurs d’une musicienne. Cela était proprement cocasse, d’autant plus cocasse d’ailleurs lorsque l’on connaissait la réalité de la situation…
Son sourire amusé se transforma en petit rire ironique qui signifiait très clairement ce qu’il pensait de l’optimisme enthousiaste de Muzio en ce qui concernait les spectateurs du ballet et ce qui les intéressait le plus lorsqu’ils se rendaient à la Fenice.

Néanmoins il ne dit rien, pas plus qu’il ne posa de question sur ce qui poussait Barrozi à lui demander un portrait de la dame Accorti. Il le saurait bien un jour, quand le médecin souhaiterait le lui dire.
D’autant que la question suivante était d’une autre envergure.


"Le Bien est-il toujours le Bien quand il châtie le Mal ? Diable, Barrozi, je comprends pourquoi vous voulez que je reprenne du café…"

Il se redressa et se resservit, ce qui lui donna le temps de réfléchir un peu.

"Ma foi… je dirais que cela dépend de ce que vous voulez que soit 'le Bien'…

Si l’on pense que le Bien est quelque chose comme… une position, une doctrine, quelque chose qui se définit par opposition au Mal, contre le Mal… s’il y a le Bien d’un côté et le Mal de l’autre, et que l’un est le Bien parce que l’autre est le Mal, alors… et bien il paraît tout à fait justifier de tout faire pour faire disparaître le Mal, puisque c’est en quelque sorte la raison d’être du Bien. En ce sens il n’y a pas de mal à brûler une sorcière, puisque la sorcière est le Mal et que donc la faire disparaître est bien.
Ce que je veux dire c’est que si l’on peut définir "ce qui est bien" et "ce qui est mal", alors faire le bien, c’est aussi supprimer le mal.

Evidemment, le problème de cette définition c’est qu’elle peut dépendre beaucoup du point de vue. Le Bien des Capulets est le Mal des Montagües, et inversement, n’est-ce pas ?"

Iago but un peu de son café pour rassembler ses idées. Il était assez absurde de vouloir régler une question aussi complexe en si peu de temps, mais il faisait de son mieux pour résumer des idées, donner une impression générale qui aiderait peut-être Muzio à apercevoir ce qu’il cherchait.

"Maintenant, si l’on pense que le Bien est, plutôt, peut-être un sentiment humain, quelque chose comme "ne pas faire de mal"… alors là, le Bien n’a plus aucune justification pour châtier le Mal. Ce Bien-là doit faire le Bien même au Mal. C’est Titus et sa clémence, le "dimitte nobis debita nostra, sicut et nos dimittimus debitoribus nostris", pardonnez-nous nos offenses comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés. C’est un Bien assez terrible n’est-ce pas, parce qu’il est absolu."

Il s’arrêta un instant, se demandant vaguement comment il pouvait parler de tout cela avec un tel calme (même s’il y avait peu de clarté dans ses propos), alors qu’il connaissait tant de chose sur le Mal déguisé en Bien. Il se demanda un instant s’il n’était pas un saint, pour croire malgré cela autant au Bien absolu, avant de se rappeler que non, il n’y avait pas de doute, il n’était pas un saint.

"Le problème de cette définition-là du Bien, c’est que nous vivons en société, et que, comme nous le savons bien, les hommes sont fondamentalement mauvais. Ou plutôt, pour être sympathique, fondamentalement très faibles à la tentation de "faire le mal". Ce qui fait que, dans une société, dans une ville comme Venise, si aucune mesure n’est prise, pour contrecarrer le Mal, il y a de forte chance que le Bien ne survive pas.
En ce sens, une société est à peu près obligée, j’imagine, de se créer, à un moment ou à un autre, une définition du Bien de la première catégorie. C’est la Loi.

Il me semble que le Bien absolue peut exister à l’échelle humaine, mais peut-être pas à l’échelle sociale."

Iago fronça les sourcils et secoua la tête d’un air peu satisfait.

"Je vais m’embrouiller complètement si je continue. Ce que je veux dire en fin de compte, c’est qu’il me semble que, de toutes les façons, quels que soient les cas possibles, le Bien qui châtie le Mal devient "un mal nécessaire" et ne reste sûrement pas un bien.
De la même manière que l’amputation d’un bras est un "mal nécessaire", parce que je ne pense pas que beaucoup de personnes soient ravies d’avoir un bras en moins.
La seule différence est que celui qui pense que le Bien se définit par sa doctrine réussira à justifier l’emploi de ce mal nécessaire. Quelque chose comme "Tu est le Mal, si je ne te supprime pas, tu feras le Mal, donc je te supprime. C'est mal, mais c'est juste". "Je vous coupe le bras, parce que si je ne le fais pas, vous allez perdre la vie."
Mais celui qui essaye de suivre un Bien absolu acceptera peut-être ce mal, mais ne lui trouvera aucune justification, et l’utilisera, s'il l'utilise, tout en sachant qu’il fait le Mal."

Et, s'il était possible d'agir ainsi, d'accepter un paradoxe aussi énorme, cela devait être terriblement désagréable. Douloureux. Déchirant. A moins que la personne, devenue un peu folle, réussisse à se persuader qu’il y avait un grand bonheur à sacrifier son âme pour châtier l’infinité du mal. Mais il fallait vraiment être complètement fou pour penser cela.
Iago rit légèrement pour lui-même et regarda Muzio avec un sourire.


"Surtout, ne me dites pas que vous songez à entrer dans une carrière de justicier de l’ombre…"
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Muzio Barrozi
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MessageSujet: Re: Etage Inférieur - Le Salon-Bibliothèque   Etage Inférieur - Le Salon-Bibliothèque - Page 2 PerleSam 31 Mai - 18:18

A son tour, Muzio rit un peu.

« Justicier de l'ombre ? Cela n'est guère en accord avec mon caractère. Pourtant, s'il fallait faire justice... Eh bien, il me semble que dans l'ombre cela serait plus facile. Mais la solution la plus facile à un problème complexe est nécessairement mauvaise, sans doute. »

Les paroles de Iago l'avaient profondément touché. Cet homme avait la faculté d'analyser les notions les plus complexes et de les lui rendre intelligibles. Et, si le médecin trouvait parfois les discours de Iago un peu obscurs, un peu abstraits, celui-ci lui parlait directement. Une certaine émotion avait même saisi Muzio en entendant parler de ce Bien absolu.

« Mais celui qui veut suivre le Bien absolu et renonce à utiliser le Mal, celui qui fait le Bien même au Mal, il renonce donc à toute justice ? Je ne crois pas, vous le savez, en l'existence d'une justice divine. Alors n'opposer que le Bien absolu au Mal, n'est-ce pas se montrer complice du Mal lui-même ? Et, ce faisant, le Bien absolu ne se montre-t-il pas plus terrible encore que le Bien qui s'accorde des déviances ? »

Ces enchaînements de paradoxes lui étaient douloureux. Déchirants. Il eut un sourire un peu triste.

« Ah, il n'y a qu'avec vous que je me prends à désespérer du Bien, vous savez. »

Mais il se ressaisit bien vite, et d'un ton plus joyeux:

« Pourtant, je ne devrais pas aujourd'hui ! Le jour où j'assiste à une naissance est normalement un jour gonflé d'espoir... Je doute que ce soit votre avis... » ajouta-t-il en souriant.

Il imaginait très bien les diatribes que pourrait lui servir Iago, sur les hommes qui multipliaient leur pourriture par le biais de leur progéniture, et qui s'émerveillaient devant un petit être fort laid d'avoir su lui donner la chance de faire perdurer cette espèce pervertie... Pourtant, peut-être n'aurait-il pas parlé ainsi de l'enfant du prince Elio.
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Iago degli Albizzi
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MessageSujet: Re: Etage Inférieur - Le Salon-Bibliothèque   Etage Inférieur - Le Salon-Bibliothèque - Page 2 PerleJeu 5 Juin - 13:06

Muzio était incontestablement quelqu’un de bon. Il n’y avait qu’à le voir s’inquiéter de ses questions pour en être persuadé. Et Iago ne put s’empêcher de sourire légèrement à le voir continuer de s’interroger sur le Bien et le Mal.

"Si cela peut vous rassurer, je ne pense pas que le Bien absolu se fasse complice du Mal. Car si le Bien ne fait pas le Mal, cela ne l’empêche pas de dire ce qu’il pense.
Comment dire… par exemple, si quelqu’un se fait battre dans la rue, la réaction du bien relatif sera de se précipiter sur celui qui frappe et de le frapper à son tour.
La réaction du bien absolu ne sera pas d’ignorer la scène, parce qu’il ne peut pas faire de mal. Ce serait de la lâcheté, ou de l’indifférence, pas du Bien. Il demandera peut-être à celui qui fait du mal de cesser, il essayera peut-être de lui faire comprendre pourquoi c’est mal. Peut-être même ira-t-il jusqu’à s’interposer quitte à recevoir lui-même les coups. Cela est le Bien absolu. Je ne pense pas que l’on puisse dire que ce soit être complice du mal. Qui peut affirmer que quelqu’un qui fait le mal arrêtera de le faire plutôt parce qu’il a été menacé ou plutôt parce qu’il a été touché par un exemple de bonté extrême ?

Mais vous vous rendez compte, j’imagine que quelqu’un capable d’agir ainsi tout le temps ne vivra sans doute pas très longtemps…"

Mais le médecin s’était repris tout seul et optait pour une vue très optimiste sur la naissance. Vue à laquelle Iago répondit par un petit "hum" assez sceptique.

"Oui, en effet n’est-ce pas… Je ne vois pas trop ce qu’il y a d’heureux dans la vision d’un être brailleur, témoignage cruel des ambitions abjectes de ses géniteurs. D’autant que l’enfant n’a absolument rien demandé et va être obligé de vivre un nombre bien trop considérable d’années de martyre tout cela à cause de l’égoïsme de deux personnes.
Et puis il est tellement facile de se servir d’un petit machin qui pense à peine tout seul pour régler ses comptes…"

La dernière phrase, un peu elliptique, avait subitement perdu de son ironie pour ne garder que de l’amertume. Il s’arrêta et ne reprit qu’après un instant, comme avec hésitation.

"Je ne voulais pas qu’il ait d’enfant, vous savez ? Je savais qu’il en aurait, il n’y a pas d’autres solutions, mais… je ne le voulais pas. Vraiment pas. J'espérais que cela n'arriverait jamais, qu'il...."

Il n'était pas besoin de préciser qui était le "il"

"Quelle stupidité…"
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Muzio Barrozi
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MessageSujet: Re: Etage Inférieur - Le Salon-Bibliothèque   Etage Inférieur - Le Salon-Bibliothèque - Page 2 PerleJeu 5 Juin - 23:14

Un sourire discret accompagna l'illustration de Iago. Quelques semaines plus tôt, Muzio avait rafistolé le gentilhomme au Castello, où il avait effectivement essuyé des coups sans répondre autrement que par la parole. Ainsi Iago mettait-il en oeuvre ses théories.

« Je vous remercie. » murmura-t-il tandis que la discussion suivait déjà son cours.

Iago ne lui épargna pas sa vision de la procréation, et Muzio ne cacha plus son sourire, amusé d'avoir si bien deviné la position de son compagnon. Pourtant... Pourtant, c'était bien autre chose que de l'ironie qui venait maintenant. Oui, le médecin avait également deviné cela. Il s'était demandé, à un moment, pourquoi Iago refusait tellement l'idée que le prince ait une descendance. Il lui semblait, à lui, que son bonheur serait grand si un ami venait à avoir un enfant. Mais, évidemment, son caractère était très éloigné de celui des personnes concernées, et les amitiés qu'il entretenait tout autant. Finalement, il avait compris intuitivement beaucoup plus que raisonnablement ce qui effrayait Iago.

Les deux derniers mots de Iago flottèrent un instant dans la pièce, tandis que Muzio observait le feu, songeur. Le silence était souvent sa réponse la plus vraie. Il reprit néanmoins pour indiquer:


« C'est une fille. Elle a déjà beaucoup de prénoms, attendez... Athénaïs, Maria, Amélia et... ah... Carmela, oui c'est cela. Carmela Maria Amélia. Ses yeux sont très clairs et je crois qu'ils le resteront, mais ses cheveux sont de jais. »

Il évita de préciser davantage le tableau émouvant de cette famille balbutiante, et ne jugea pas plus nécessaire d'indiquer combien Elio semblait fier de sa paternité. Une fierté qui ne devait rien au rang, mais tout à la nature, à la nature d'homme-animal.

« Mais il n'y a pas de raison pour que le prince soit changé. » ajouta-t-il après une hésitation, se demandant s'il avait bien le droit de dire cela. « L'amour, l'affection, toutes ces choses, échappent aux mathématiques: cela se multiplie, mais ne se divise jamais. Cela vous semble un peu mièvre, sans doute, mais je crois que c'est vrai. »

Il jeta un coup d'oeil à Iago puis reporta le regard sur les bûches qui se consumaient lentement.

« Dans une naissance, je ne vois pas d'égoïsme. Ne dit-on pas "donner la vie" ? Certes, elle nous est plutôt imposée ! Et certes, cela ressemble parfois à un cadeau empoisonné. Mais c'est aussi l'occasion de donner une nouvelle chance à... à l'humanité, peut-être. L'idée d'une chaîne, d'un relais vers... je ne sais pas, le mieux. J'ai une vision très belle et très peu scientifique de la procréation. » avoua-t-il avec une mimique désolée.

Il se redressa, se secoua et conclut:

« Enfin, vous et moi, nous avons laissé cette noble tâche à d'autres. »
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Iago degli Albizzi
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MessageSujet: Re: Etage Inférieur - Le Salon-Bibliothèque   Etage Inférieur - Le Salon-Bibliothèque - Page 2 PerleMer 18 Juin - 16:09

Iago eut une expression de dérision à la dernière phrase du médecin.

"Oui, en effet. Je pense que mes parents seraient prêts à payer plutôt que d’avoir à me présenter à une jeune fiancée. A moins que ce ne soit une fois de plus un grand jeu pour…" Un frisson glacé courut le long de sa colonne vertébrale. "Non, non. Aucune chance."

Il reprit du café comme si l’amertume de la boisson pouvait faire passer l’amertume qu’il ressentait.

"Mais vraiment je ne comprends pas votre optimisme. Votre raisonnement sur l’amour qui se démultiplie, oui. Car cela est visible. Plus un être est aimé et aime plus il est capable d’aimer. L’amour est une question d’entraînement plus que d’autre chose.
Mais pour les enfants…"

Iago réalisa soudaine que Muzio ne connaissait peut-être pas si bien les horreurs qui pouvaient se dérouler d’être les belles façades des familles de la noblesse. Et pourtant, il n’arrivait pas à imaginer que la situation puisse être fondamentalement différente dans les familles de la bonne bourgeoisie citadine ou du peuple.

"Les enfants ne sont que des jouets entre les mains de leur parent. Il n’y a rien de plus facile que de les tirer d’un côté ou de l’autre. Ce sont des morceaux d’argiles malléables, et lorsqu’il y a des comptes à régler entre les parents, quoi de plus facile que de se servir des enfants, ces choses entre les deux ?

La fille d’un Adorasti et d’une Grazziano… Bien sûr l’Elio que je connais ne lui fera jamais de mal. Il sera peut-être même touché, fier, que sais-je. Il l’aimera sans doute. Mais il l’aimera aussi parce qu’elle est sa fille, une Adorasti.
Même si la Princesse est d’une bonté extrême, et accepte que sa fille soit élevée comme une Adorasti… Elle aime tellement son frère, elle ne voudra pas que sa fille ne connaisse pas sa famille Grazziano.
Et la famille Grazziano… Croyez-vous vraiment qu’elle laissera la fille de sa fille devenir une parfaite Adorasti ?
La grossesse de la Princesse est si étrange. Peut-être n’aura-t-elle pas d’autres enfants, pas de fils. Samuele, lui, a une hypothétique fiancée. Mais auront-ils une descendance ?

Vous imaginez ? La petite Athénaïs Maria je ne sais plus trop quoi, seule héritière des deux familles ? Qui épousera-t-elle ? Un homme qui servira les intérêts des Grazziano ? des Adorasti ? Et elle, préfèrera-t-elle Florence, Naples ?

Cette enfant est née avec le poids de la haine de deux familles sur la tête. Croire que sa naissance pourrait permettre de réconcilier deux familles, tient de l’utopie.
Ce qui a réconcilié les Capulets et les Montaigu, c’est la mort de Roméo et Juliette. Pas la naissance d’un enfant. Et parce qu’ils s’aimaient, et que les deux familles étaient en bout de souffle à force de se tuer. Il n’y a pas de tel sentiment entre Elio et son épouse, et les deux familles sont en pleine expansion.

La seule chose que l’on puisse souhaiter à cette enfant, c’est l’immense chance d’avoir des parents qui aient assez d’affection pour elle, de manière à ce que le calvaire qui, inexorablement, l’attend, ne commence que le plus tard possible."

Iago soupira puis se frotta énergiquement les paumes des mains contre les yeux. Sa manière à lui de se forcer à ne pas s’enliser dans des pensées peu agréables.

"Vous comprenez ? Je ne crains pas vraiment qu’Elio change. Je crains que la situation ne modifie son comportement. Et voir un enfant pris entre Elio et sa femme, ce serait… insupportable."
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Muzio Barrozi
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Muzio Barrozi


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MessageSujet: Re: Etage Inférieur - Le Salon-Bibliothèque   Etage Inférieur - Le Salon-Bibliothèque - Page 2 PerleSam 21 Juin - 23:35

L'un des traits de caractère que Muzio s'efforçait de cultiver était la lucidité. Et l'un des traits de caractère propres à Muzio était la confiance qu'il avait dans les grandes choses de la vie. Conjuguer ces deux qualités représentait un exercice de chaque instant.

Le médecin avait écouté son ami - oui, il s'autorisait à penser que la relation qui le liait à Iago était bien de l'amitié - sans cesser de le regarder, les sourcils légèrement froncés. Le tableau était sombre et corrodait les belles pensées qu'avait eu Muzio. Non, même s'il avait toujours su que l'héritière du prince portait un lourd fardeau, jamais il n'en avait pris conscience à un tel point.

Contrairement à ce que pouvait penser Iago, les choses étaient bien différentes pour les familles n'appartenant pas aux grandes noblesses du pays. Bien sûr, les parents avaient une certaine ambition pour leurs enfants et les mariages d'amour n'étaient pas forcément les plus nombreux. Néanmoins, jamais les luttes familiales n'atteignaient des extrémités telles que celles décrites par Iago.

La lucidité se mêlait d'un certain abattement qui altérait sa foi infuse. Il songea soudain qu'il aurait peut-être mieux valu pour Athénaïs Adorasti qu'il ne soit pas démené pour la ramener à la vie. Sa pensée l'effraya.


« Je comprends maintenant, je crois que je comprends. » acquiesça-t-il assez gravement. « Cela m'apparaît... », et ce sentiment était très éloigné de son caractère, « cela m'apparaît comme un cercle, vicieux et absurde, la fatalité... Un cercle qui ne pourrait se briser qu'avec la mort, selon vous. Et dire que beaucoup envient la petite princesse... »

Dieu que les hommes savaient compliquer la vie et la rendre douloureuse.

La conversation entre les deux hommes avait petit à petit empli la pièce d'une gravité triste. Muzio crut bon de ne pas prolonger trop longtemps ce moment de silence qu'ils partageaient. Quitter Iago sur de tels propos était le meilleur moyen pour grever sa soirée et le dissuader définitivement de se rendre à la Fenice.


« Permettez-moi de repartir sur une note plus légère. Vous vous êtes décidé à reprendre l'escrime ? »

Parfois Iago attendait négligemment le médecin à la sortie de son cours avec Mila, mais jamais Muzio n'avait cru déceler chez le gentilhomme l'envie de croiser le fer. Pourtant, c'était bien dans la salle d'armes qu'il l'avait trouvé quelques heures auparavant.
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Iago degli Albizzi
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MessageSujet: Re: Etage Inférieur - Le Salon-Bibliothèque   Etage Inférieur - Le Salon-Bibliothèque - Page 2 PerleMer 9 Juil - 2:34

Muzio comprenait, et Iago ne se sentait pas particulièrement heureux d’avoir une fois de plus éclairer quelqu’un sur les vicissitudes de la vie. Mais ce qu’il y avait d’agréable avec le médecin, c’est qu’il cherchait toujours à voir plus loin, et à garder espoir. Ce qui le poussait parfois à changer brusquement de sujet.

Le gentilhomme eut une grimace amusée à l’idée de reprendre l’escrime.


"Oh non ! Certainement pas. Mon affinité pour les choses pointues a la même force que celle d’un chat pour l’eau. Mais j’ai été quelque peu forcé dans l’histoire. Peu importe, c’était intéressant.
La dame est particulière. Vive et intelligente. Sans maniérisme. Du moins, sans trop de maniérisme. Mélange rare et à cultiver. Elle m’a dit des choses pour le moins… curieuses.

Nous avions parlé de Matteo un peu, de sa mort et…"

On commençait à attendre un grand bruit dans l’escalier, et Iago s’avança de manière à se rapprocher de Muzio et à parler bas, les coudes plantés sur les genoux.

"Pour faire court, il semblerait que la dague qui a tué Matteo ait été aux armes d’Elio. Curieux, n’est-ce pas ?"

Le bruit se fit de plus en plus distinct. Une voix de femme qui hurlait quelque chose comme "Mais enfin ! Je suis sur le point de mourir et vous ne voulez pas me permettre de voir le docteur !". Le pauvre Alessandro semblait vouloir faire remarquer que vu la voix de la dame elle ne devait tout de même pas être réellement en train de mourir, mais sa voix à lui était couverte par le boucan.

"Evidemment, garder ça pour vous. Mais j’aimerai votre avis. Ce soir à la Fenice ? Nous trouverons bien un moment pour discuter. Je serais sans doute à l’orchestre. J’essayerai de vous trouver."

Iago avait parlé rapidement et précisément, d’un air calme mais néanmoins très sérieux. Cet air sérieux tomba brusquement pour laisser place à l’amusement le plus clair.

"Il est temps que je prenne la fuite, je crois. Je vous laisse au monstre sous un déguisement de femme qui tente de forcer votre porte…"

Le jeune homme se fendit d’une petite révérence comique et ironique, avant de s’échapper, sans manquer de saluer au passage la dame d’un très sérieux "Madame, il me semble que vous devriez voir un prêtre plutôt qu’un médecin".
Ce qui évidemment ne fit que redoubler les cris de la bête.

Vraiment, pauvre Muzio…


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MessageSujet: Re: Etage Inférieur - Le Salon-Bibliothèque   Etage Inférieur - Le Salon-Bibliothèque - Page 2 PerleSam 26 Juil - 22:21

« D'Elio ? Je veux dire... du Prince ? »

Muzio s'était penché en avant dans un réflexe mimétique, mais la révélation le fit se redresser un peu brusquement.

« Mais... »

Oui, c'était pour le moins curieux. Mais le médecin ravala ses objections et hocha la tête, les sourcils à peine froncés.

« Entendu, ce soir à la Fenice. »

Au moins une bonne raison pour y aller.
Il se leva pour raccompagner Iago et salua la réflexion finale de ce dernier par une grimace. Il regarda la porte se refermer derrière son visiteur, puis soupira légèrement avant de se retourner. Sus à la bête.


[A suivre]
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MessageSujet: Re: Etage Inférieur - Le Salon-Bibliothèque   Etage Inférieur - Le Salon-Bibliothèque - Page 2 Perle

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