VENISE
Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.



 
AccueilAccueil  RechercherRechercher  Dernières imagesDernières images  S'enregistrerS'enregistrer  ConnexionConnexion  
Le Deal du moment : -40%
Tefal Ingenio Emotion – Batterie de cuisine 10 ...
Voir le deal
59.99 €

 

 Le Caffé Florian

Aller en bas 
+8
Annavera de Luca
Iago degli Albizzi
Orfeo Ciriaco
Graziella Rivieri
Muzio Barrozi
Matteo Salvanti
Elio Lacryma Adorasti
Pourpre
12 participants
Aller à la page : Précédent  1, 2, 3, 4, 5, 6  Suivant
AuteurMessage
Tannucci
Invité




Le Caffé Florian - Page 2 Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian - Page 2 PerleVen 8 Juil - 13:45

(excusez moi de mon retard les amis, à l'avenir j'éviterai de vous faire languir de la sorte ^^)

Tannuccia se sentit observée, les regards inquisiteurs qu'on lui lançait étaient dépourvus de discrétion, et elle aurait presque pu les chasser d'un revers de main tant ils semblaient denses.Se pourrait-il que ses deux compagnons eussent remarqué quelque chose "d'etrange" dans son comportement ? Il était possible.Venise était une ville de fins observateurs, qui ne prenait pas garde à ce qui se déroulait autour de lui avait de forte chance....de ne plus pouvoir y prendre garde.De toute façon peu importait, elle était encore une fois le centre des regards alors cela lui convenait et ranimait la flamme qui avait vacillé quelques instants auparavant.Quoiqu'elle fasse, même la plus infime et ridicule chose, elle attirait l'attention, même sans le vouloir.Preuve était qu'elle était faite pour être vue, être choyée, être admirée.Cette bouffée de narcissisme fit rosir ses joues, briller ses yeux ainsi que pétiller son sourire.

Une fois ayant repris totalement contenance et maitrise d'elle, elle lança à Matteo et à Muzio un sourire charmeur pour détromper ce qu'il eussent pu penser.Attendant leur commande avec impatience, Tannuccia se mit à détailler la salle.Le nombre de tables, de chaises, les personnes présentes.Tiens, cette dame là elle la connaissait, elle trompait son époux avec son intendant.
La décoration du lieu était si...pittoresque alors que si élégante.La personne étant à l'origine de cette dernière était vrai génie : faire les gens se sentir à l'aise dans un endroit luxueux tout en leur laissant une impression d'extrême simplicité et de bien-être dû aux tapisseries aux motifs étranges ainsi qu'à la mosaïque aposée sur les murs.

Muzio commandait un café chaud...sans sucre.Un café dénotait parfaitement du caractère qui semblait être cleui du médecin : sûr, doux, racé et pourtant...amer, ses expériences passées probablement.Le fait que le café soit dénué de sucre était purement professionel, le sucre étant fort mauvais pour la santé.Que matteo commande un vin de Chypre de qualité supérieure fit rire tannuccia.Le caractère joyeux, fétard, volubile et expressif du jeune homme se retrouvait dans le vin de Chypre, vin que Tannuccia affectionnait.Oui elle buvait, cela lui arrivait, mais tout le monde savait qu'elle faisait fi des convenances et des commentaires acerbes concernant sa personne.Elle buvait si cela lui plaisait, bien sûr elle ne prenait jamais de "cuite", car elle savait que pour une femme c'étai très laid, mais le fait d'être un peu plus joyeuse n'était pas mauvais.Cela coûterait cher, ce vin n'était pas le nectar dont le prix était le plus bas, mais elle tenait à combler ses invités d'un soir.


-"Excellent choix Monsieur Salvanti."

Le garçon de café à la pose ridicule, que dis-je, pathétique la regarda intrigué.D'un revers de mains gracieux elle le chassa, elle ne voulait pas qu'il s'attarde à leur table, il avait bien mieux affaire que de les "espionner".Il n'était pas de leur condition.

Matteo se présenta aussi, ajoutant quelques détails.C'était il semblerait, le meilleur choix qu'elle eut fait, le laisser se présenter, car, si elle eut été de bonne humeur, elle l'aurait fait avec...trop d'éloquence, parlant même des Grazziano que Matteo n'avait point évoqué.Elle adressa au jeune homme un regard complice avec lequel elle redessina ses traits fins et agréables à la vue.
Malgré son côté naïf, il savait se montrer prudent.Il le fallait.Et elle ne doutait pas qu'il eut déjà tué de sang-froid pour le compte de son Maître auquel il vouait une admiration et une dévotion sans limites.Ugo était effectivement quelqu'un au charisme puissant, retenant la lumière et les regards, une personne imposante.Peut-être trop.Tannuccia le trouvait intéressant, fort mystérieux et...incroyablement séduisant.

En pensant à cela elle ne put s'empêcher de laissant glisser son regard sur le front luisant du médecin.Une course passée contre la mort d'un patient, ou bien le café avait été trop chaud à son goût ? Lorsqu'il s'adressa à elle, elle descendit son regard lentement, retraçant les ligne de son nez volontaire avant de plonger son délice d'ébène dans les yeux tout aussi sombres du médecin.


*Quel regard passionant...*

Elle écouta avec attention ce que déclara muzio.Où désirait-il en venir ? Trévizno...Treviano...Médecin...Non elle ne l'avait pas connu mais avait écouté les rumeurs.Certains disent qu'il est parti de Venise, d'autres qu'il a été enlevé, d'autres encore qu'il est mort.Tannuccia quant à elle, n'avait guère d'opinion ou si....elle pensiat qu'il était parti de Venise, qu'il avait été enlevé et qu'à ce jour il était mort.À cette simple pensée elle sourit.
Avant qu'elle n'eut pu répondre le garçon de café se présenta à leur table.Il déposa le café brûlant et sans sucre devant Muzio, le vun de Chypre coûteux et exquis devant Matteo et le thé devant Tannuccia, qui, elle non plus n'avait pas demandé de sucre.D'un geste fluide de la main elle empêcha le garçon de parler et lui tendit quelques pièces, amplement de quoi payer les trois boissons ainsi que d'engraisser la "fortune" personnelle du jeune homme qu'elle congédia du même geste de main.Pourquoi avait-elle donné tant ? Était-ce pour montrer qu'elle ne manquait et ne manquerait de rien ou bien par simple étourderie ?


-"Monsieur Tréviano dites vous ? je ne connais de lui que ce que les ragôts ont pu m'apporter ce qui est je dois le dire, bien faible.Parti de Venise ? Disparu ? Enlevé ? Mort ? Hum...que de rumeurs cocasses.Et vous Matteo, le connaissiez vous ? Et vous Muzio ? Saviez-vous quelle était sa renommée ? Pensez-vous qu'il vous sera dur de vous forger une réputation si ce dernier -peut-être mort et enterré- était un médecin fort réputé ?"

Tannuccia adressa un sourire franc au médecin.Elle ne tenait pas à le mettre mal à l'aise, juste à orienter la conversation de telle sorte que ce ne soit plus elle la proie, mais lui.Bien, quel retournement de la situation, elle était déjà plus locace.Elle jeta un coup d'oeil discret à Matteo avant de saisir sa tasse, de souffler pour refroidir le thé, dont l'arome puissant en vint à chatouiller ses narines, avant de la porter à sa bouche dans une moue satisfaite.
Revenir en haut Aller en bas
Muzio Barrozi
Médecin
Muzio Barrozi


Nombre de messages : 726
Date d'inscription : 14/05/2005

Le Caffé Florian - Page 2 Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian - Page 2 PerleVen 8 Juil - 18:59

Muzio examinait son interlocutrice tout aussi bien que si elle s'était présentée à son cabinet, exposant son corps à un regard professionnel. On en apprenait tout autant en observant évoluer quelqu'un en société. Un animal dans son milieu naturel, avait-il pensé sans le vouloir. Néanmoins, il était ici un acteur à part entière, et c'était ce qui distinguait cette situation d'un examen médical. Il ne devait pas laisser croire qu'il essayait de comprendre les individus. Et donc il fallait parler, bouger, boire, rire... Vivre. D'ailleurs, son regard se fit volontairement moins insistant, moins doctoral. Il reculait pour ne revenir qu'à la surface de la personne, gardant la profondeur pour un moment plus approprié. Les yeux de la Princesse plongés dans les siens ne provoquèrent aucun malaise chez lui; il les soutint un moment, puis les baissa tranquillement vers la tasse qui venait de lui être approtée. Il y avait longtemps qu'il ne considérait plus l'abaissement de regard comme une défaite: il s'agissait là d'un jeu pour les enfants, pour ceux qui tentent de s'imposer comme ils peuvent, de se prouver qu'ils sont quelqu'un de respectable...

Le médecin porta son café à ses lèvres et, lentement, en but une gorgée, puis une deuxième; celui-là, contrairement au premier qu'il avait avalé, il le savourait. Il ne soufflait jamais dessus, comme si ce geste en enlevait l'essence... Sa main reposa doucement la tasse sur sa soucoupe, tandis que sur sa langue résonnait encore l'amertume du breuvage brûlant. Lorsque Tannuccia paya les boissons, il ne fit aucun geste pour la rembourser; elle avait décidé cela, très bien, elle était assez grande pour prendre ses décisions, aussi biscornues soient-elles. Après tout, régler le thé d'une demoiselle s'avérait figurer dans la galanterie, et la galanterie n'avait rien de démodé aux yeux de Muzio. Mais si elle l'était pour la Princesse, tant pis pour elle. En revanche, se faire appeler par son prénom passa bien plus mal. Personne ne le nommait plus 'Muzio' depuis plusieurs années, et ce n'était pas une jeune effrontée, même tourmentée, qui allait le faire ! Le regard du médecin se fit inconsciemment plus froid. L'interrogatoire qui suivit n'arrangea rien. Le fait que le sujet ait immédiatement viré sur la disparition de Tréviano encore moins...


"Mademoiselle, je regrette de n'avoir aucune croustillante affaire à vous raconter à propos de mon prédécesseur, ne l'ayant jamais connu personnellement. Quant à ma réputation, je vous avouerai qu'elle n'a que très peu d'importance pour moi. Si maître Tréviano était fort réputé, grand bien lui fasse. Un médecin s'attache plus à sauver un homme que sa réputation. Du moins, c'est ainsi que j'envisage mon activité..."

Le sourire empreint de franchise de Tannuccia lui avait permis de réfréner la tonalité froide qui voulait pointer dans sa voix. En aucun cas il ne se sentait traqué; après ce qu'il avait vu quelques heures auparavant il se sentait la force de lutter à sa manière contre le monde entier s'il le fallait.
Revenir en haut Aller en bas
Matteo Salvanti
Homme de Main - Ca'Grazziano
Matteo Salvanti


Nombre de messages : 390
Statut : Assassiné le 5 février 1744 en soirée au Jardin du Castello.
Date d'inscription : 02/05/2005

Le Caffé Florian - Page 2 Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian - Page 2 PerleVen 8 Juil - 19:56

Matteo observa le nouveau changement dans le comportement de Tannuccia, qui était revenue à son masque habituel. Ses humeurs étaient-elles toujours aussi variables, fluctuant au gré du temps et des circonstances? Sa dernière déconvenue n'avait échappé à l'oeil d'aucun de ses deux interlocuteurs, qui ne lui voulait heureusement aucun mal. Du moins, pas encore. L'homme de main se sentit légèrement inquiet pour elle. Elle savait extrêmement bien cacher son jeu... mais elle demeurait une femme. Les femmes n'obéissaient pas aux mêmes lois que les hommes. Leurs sentiments entraient souvent en ligne de compte, contrairement aux hommes dont l'ambition et la vengeance étaient les principaux motifs d'action.

La conversation fut interrompue lorsque le serveur arriva à leur table. On présenta la bouteille à Matteo, qui acquiesça avec un sourire, puis on lui versa une coupe. Matteo huma le doux arôme qui s'exhalait du vin avec volupté. Il ferma les yeux un instant, se remémorant le souffle du Prince Adorasti contre sa peau. Puis, il prit une gorgée qui se révéla être un délice pour sa bouche de fin gourmet. Sophistiqué, enivrant, mais surtout, une saveur si exquise, si suave qu'on ne pouvait qu'en vouloir encore et encore. Quel excellent choix que ce vin de Chypre. Il convenait parfaitement au captivant Elio Lacryma Adorasti. Le jeune homme passa sa langue sur ses lèvres rosées. Définitivement délectable.

La Princesse paya alors leurs consommations. La galanterie de Matteo lui criait de s'interposer, mais son bon sens lui commandait de ne rien faire. Après tout, ce n'était qu'une autre preuve que la jeune femme ne se soumettait à aucune des conventions de leur époque. Une fois le serveur parti, elle s'attaqua immédiatement à Barrozi. Matteo fut surpris par son franc-parler. Elle ne manquait décidément pas de front et à en juger par la réaction de son interlocuteur, il en avait lui aussi été saisi. Matteo dirigea toute son attention vers l'homme mûr, attendant avec impatience de voir ce qu'il répondrait.

Matteo put alors admirer la manière dont le médecin se débrouilla avec l'épineuse question qui lui avait été lancée. Ainsi donc, cet homme n'était pas l'un de ces assommants scientifiques qui n'avaient que pour seul discours les dernières théories émises par leurs non moins assommantes sociétés. Car, en plus d'être d'un ennui accablant, ces savants semblaient ne mettre leur brillant intellect qu'au service de leurs recherches et rien d'autre. Ils commettaient donc les pires bévues de la vie mondaine en comparant telle jeune noble à une obscure guenon d'un continent éloigné ou en évoquant le faciès similaire du Pape et d'un primate quelconque. Il semblerait que ce ne fut pas le cas de ce Barrozi, qui avait clairement exprimé son refus de s'étendre sur le cas de Tréviano et avait, du même coup, certifié son intégrité. Cet acte admirable, perpétré au vu et au su de nulle autre que l'intrépide Princesse Tannuccia, lui valut tout l'admiration de Matteo. Le garçon lui accorda un sourire amusé et admiratif, et hocha la tête avec entendement, l'air de lui donner son entière approbation.

Souhaitant traduire son enthousiasme en mots, Matteo commenta avec un large sourire:


« Maître Barrozi, je me vois fort enchanté par vos paroles! Voir un homme de votre dévouement envers sa société, voilà une attitude des plus nobles, qui mériterait d'être soulignée à sa juste valeur! Ah, comme ce bas monde serait plus juste et bon s'il n'était peuplé que par des hommes de votre trempe... même si cela signifierait l'extinction de gens de MA trempe! »

Ceci dit, Matteo rejeta la tête vers l'arrière et rit à gorge déployée. Le dernier coup d'éclat de Barrozi l'avait mis d'une fort belle humeur! Quelle originalité! Transgresser ainsi les règles de l'art, refuser d'être tout de miel devant les charmes de la Princesse, c'était un bien bel exploit.
Revenir en haut Aller en bas
Tannucci
Invité




Le Caffé Florian - Page 2 Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian - Page 2 PerleJeu 18 Aoû - 0:29

Tannuccia leva les yeux au ciel en secouant la tête pour exprimer son mécontentement vis à vis de la réponse donnée par le médecin.Elle avait vu passer dans les yeux du médecin une lueur effarouchée lorsqu'elle avait pris l'iniative de le nommer par son petit prénom mignon.Elle était bien entendu consciente de n'en avoir fait qu'à sa tête, dépassant les limites déposées là devant elle, mais son caractère de jouvencelle gâtée la poussait aux pires extrémités.Elle se permettait toutes sortes de choses et jamais personne ne se permit de la réprimander.L'on put dire qu'en tant que femme intelligente elle eut pu faire preuve de plus de tact et discerner elle-même les limites, mais non, elle avait besoin d'un minimum d'autorité pour compléter sa "merveilleuse" éducation.Mais la façon dont la médecin la regardait, avec froideur et...ce...sentiment de mépris mêlé d'indignation...Ce regard qu'avait son père parfois lorsqu'il la regardait...elle ne le supportait.Ce regard lui donnait envie de faire la capricieuse, de tout envoyer valser sur la table, la théière, la tasse de thé brûlant de ce médecin ridicule, le vin de Chypre de Matteo ainsi que son sourire qui ne lui avait rien fait.En clair, envie d'un caprice.

Elle déposa sa tasse de thé brûlant sur la table, joignit ses mains et y déposa son menton, puis, serra ses mains jusqu'à ce que les jointures en deviennent blanches, tout en détendant son visage dans un sourire épanoui.Comment osait-il lui tenir tête, de quel droit ? Elle inspira deux ou trois fois puis se calma, réfléchit quelques instants aux belles paroles du médecin, analysant la situation.Il était calme, extrêmement calme, pas le moins ud monde intimidé ou charmé par sa personne.parfait.Tannuccia adopta volontairement une attitude digne et calme, un visage empreint de maturité et de sagesse, cette même expression qu'avait son père lorsqu'il lisait.Oui...intéressantes paroles que celles du médecin, encore un humaniste, un optimiste croyant en l'Homme.En pensant à elle ainsi qu'à son caractère retors, elle ne put s'empêcher de se dire que s'il croyait en l'Homme, il était perdu.Tannuccia sentit un sourire poindre ainsi qu'une fossette se dessiner sur sa joue gauche.Elle resta figée dans cette expression durant le temps que Matteo parla.Elle ne put s'empecher de constater qu'elle était las de ces belles paroles débitées comme si l'on parlait de la pluie ou du beau temps.Il était temps pour elle de se retirer, tant pis si elle donnait l'impression de fuir, elle n'en avait que faire, elle est si lasse.

Elle regarda sans voir Matteo rire à gorge déployée, d'apparemment fort bonne humeur.Elle ne savait pas exactement ce qui pouvait le faire tant rire, mais elle devinait que cela avait un rapport avec la discussion qu'avaient eue Tannuccia et Maitre Barrozi.Quant à elle, elle était de fort méchante humeur et l'idée de rentrer à la demeure de Ugo Di Grazziano l'omnubilait.Là-bas, elle pourrait casser un vase si l'envie lui en prenait, sans craindre d'etre sévèrement réprimandée par on ne sait quel père.Quoique voilà bien deux printemps qu'elle n'avait point subi son courroux.
Tannuccia tourna son regard d'onyx vers le médecin et applaudit doucement tout en souriant, affichant une mine admirative.PLus elle y repensait, plus ce qu'avait dit Muzio lui plaisait.Elle l'aimait bien finalement.


"Que voilà de belles paroles Maitre Barrozi.Sensées, intéressantes, désintéressées.Voilà ce qui manque à notre société, des humanistes oeuvrant pour le bien de celle-ci sans rien en attendre en retour.Ni argent, ni gloire, juste la fierté de savoir que l'on a bien fait.Je m'incline devant tant de droiture Monsieur.Je doute arriver un jour à votre grandeur d'âme.Il me semble vous avoir offusqué tout à l'heure en prononcant votre prénom.Pardonner mon manque de délicatesse à votre égard, Maitre Barrozi, je ne suis qu'une effrontée capricieuse.Sur ce je vous souhaite à vous, tournant la tête vers Matteo, une excellente fin d'après-midi à moins que vous ne osuhaitiez, matteo, m'accompagner ?"

Tannuccia lança à Matteo un regard inquisiteur curieuse de savoir ce que celui-ci allait en penser.Elle doutait qu'il ne se joigne à elle, lui préférant la compagnie de Maitre Barrozi, espérant ainsi par ses belles paroles et ses charmes, parvenir à entrainer le placide médecin dans ses filets.Elle fit signe à un serveur de s'approcher afin de tirer sa chaise vers l'arrière, le remarcia tout en se levant avec dignité et grâce.Elle ne put s'empêcher de soupirer de lassitude, jeta un coup à sa tasse de thé encore à moitié pleine ou vide, peu importait, elle n'en voulait plus, la faim lui manquait et son idiot de frère allait se marier.La rage lui tordit le ventre.Pourquoi lui réussirait-il ?! La rage laissa place à la jalousie et la rancoeur puis à la tristesse.La Princesse se retint discrètement au bord de la table attendant la réponse de Matteo, masquant son chagrin derrière un joli sourire épanoui.
Revenir en haut Aller en bas
Muzio Barrozi
Médecin
Muzio Barrozi


Nombre de messages : 726
Date d'inscription : 14/05/2005

Le Caffé Florian - Page 2 Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian - Page 2 PerleDim 21 Aoû - 18:19

Le rire de Matteo puis la réaction de Tannuccia avait de quoi laisser le campagnard qu'était Muzio perplexe. Repoussant à plus tard l'examen du comportement de Salvanti qui paraissait s'amuser beaucoup, le chirurgien fixa son attention sur Tannuccia; le personnage complexe qu'elle semblait être lui échappait par certains aspects. Elle se voulait forte, révoltée, indifférente et passionnée à la fois - mais le médecin ressentait nettement la vulnérabilité qui se cachait sous ces abords libertins. Malgré une certaine irritation due à l'applaudissement et aux paroles de la princesse, Muzio réalisa qu'il ne pouvait être fâché ou vexé face à la jeune femme qu'il jaugeait ainsi. C'est pourquoi le léger froncement de sourcils qu'il avait laissé échapper s'atténua bien vite, sans toutefois céder la place à un sourire, tant pis pour la politesse. Seul l'adoucissement de l'éclat noir de ses yeux trahissaient sa placidité, à la limite -mais limite non franchie- de la sympathie. Le médecin se leva lorsque Tannuccia en fit autant, et s'inclina galamment devant elle. En se relevant, il comprit qu'il ne s'était pas trompé en soupçonnant la princesse de cacher son état d'esprit: la lueur qui brillait actuellement dans ses yeux démentait fortement son sourire épanoui.

"Permettez, madame, qu'un "esprit humaniste" vous rassure -si tant est que cela vous inquiète-: la "grandeur d'âme" n'est jamais acquise, mais tout individu peut travailler à l'acquérir. Certains penseurs ont même vu là le but de toute existence..."

Muzio aurait sans doute pu continuer sur ce sujet pendant plusieurs minutes, mais on ne manquerait pas de lui reprocher alors son sermon. Aussi préféra-t-il prononcer ces paroles d'une manière presque anodine, avant d'enchaîner sur le départ inattendu de la princesse. La contrariété due à la conversation n'était assurément pas seule en cause... Qui aurait dit que la ténébreuse princesse souffrait émotionnellement parlant ?

"Vous me voyez navré de la fin prématurée de notre rencontre, madame. J'espère vivement qu'une occasion de continuer cette discussion nous sera offerte prochainement... en dehors d'une consultation bien évidemment. Toutefois je puis vous assurer que mes services sont à votre disposition."

De nouveau une inclinaison polie de la tête, puis un regard interrogateur en direction cette fois-ci du jeune homme qu'il n'avait pas eu le temps de cerner encore. Peut-être l'aurait-il si celui-ci décidait de ne pas accompagner Tannuccia ? Le coin droit de la bouche de Muzio se releva imperceptiblement: la compagnie de la ravissante princesse était sans nul doute beaucoup plus passionnante pour un garçon tel que Salvanti que celle d'un chirurgien poussiéreux...
Revenir en haut Aller en bas
Matteo Salvanti
Homme de Main - Ca'Grazziano
Matteo Salvanti


Nombre de messages : 390
Statut : Assassiné le 5 février 1744 en soirée au Jardin du Castello.
Date d'inscription : 02/05/2005

Le Caffé Florian - Page 2 Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian - Page 2 PerleDim 21 Aoû - 20:11

Matteo écouta la tirade de Tannuccia avec le plus grand intérêt. Leurs opinions se rejoignaient, même si aucun d’eux n’était prêt à s’investir dans ce soi-disant humanisme. Pour sa part, le jeune homme prisait l’hédonisme à cette philosophie d’idéalistes, mais n’en admirait pas moins les adhérents, dont ce Muzio Barrozi semblait un fervent partisan. La Princesse s’excusa ensuite de l’usage du prénom du médecin d’une façon bien originale. Sa franchise désarmante, son jugement dur de sa propre personne… Tous des éléments qui la rendaient aussi fascinante. C’est avec surprise que le garçon accueillit la nouvelle du départ de la jeune femme. Les quittait-elle par peur de faire un nouveau faux pas? C’était curieux. Une autre preuve que sa fougue était peut-être plus feinte qu’elle ne le laissait croire.

Matteo se trouva alors tiraillé par deux forces antagonistes. D’un côté, la Princesse Tannuccia et les promesses d’infinies douceurs que son corps voluptueux lui faisait miroiter. De l’autre, un médecin de campagne d’âge mûr, directement rattaché à son devoir envers le Prince Ugo, car, bien que l’homme ne fut à Venise que depuis peu, sa profession en faisait un acteur de la pièce qui allait se jouer. À en juger par son caractère, aussi minime son rôle pourrait-il se révéler, il n’en resterait pas moins crucial. On pouvait soudoyer un praticien afin que les doses de ses ordonnances deviennent fatales. Contre un pot-de-vin, un médecin donnait de faux diagnostiques qui amoindrissait ou augmentait un mal, chaque fois au détriment du patient visé. Mais il n’y avait pas que l’argent qui faisait tourner le monde… Un joli petit blond mettait les hommes les plus farouches dans les meilleures dispositions, qu’il soit humanistes ou pas.

Les yeux du blondinet allèrent se poser sur les longs doigts fins du chirurgien. Sa connaissance de l’anatomie devait être profonde. Ses mains étaient habituées à entrer en contact avec le corps humain. Et qui sait si cet homme réservé au calme olympien se révélait tout autre une fois au lit? Tout émoustillé, le garçon se tortilla sur sa chaise. Sa décision était prise. Il ferait perdre sa digne contenance au Maître Barrozi. Maître. On verrait bien s’il le resterait longtemps, car, on ne le dira jamais assez, les jolis petits blonds, celui assis au Caffé Florian en particulier, arrivaient toujours à leurs fins.

L’homme de main se leva à son tour et s’inclina dans une galante courbette devant la Princesse. S’il lui faisait ses adieux maintenant, il était pour lui évident que leur relation n’en était qu’à ses débuts et il avait bien l’intention de la voir grandir.


« Princesse, le temps que vous avez condescendu à m’accorder fut absolument délicieux. J’ai bien peur de faire entorse à ma réputation de gentilhomme en déclinant votre charmante invitation, mais j’ai malheureusement ce vin de Chypre à terminer en l’agréable compagnie de Maître Barrozi. Nous nous retrouverons, je n’en doute point, à l’heure du dîner. »

Il omit sciemment de dire à quelle table les deux jeunes gens prendraient leur repas. Il était préférable de ne pas encore afficher son appartenance à la Maison di’Grazziano. Apparaître tout aussi neutre que le médecin lui-même, se placer au même niveau que lui afin que leur conversation ne soit pas entravée par des réserves ou préjudices.
Revenir en haut Aller en bas
Bertucci
Invité




Le Caffé Florian - Page 2 Empty
MessageSujet: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian - Page 2 PerleLun 22 Aoû - 21:32

[Taverne de l'Ours]

Bertuccio poussa la porte du caffé. Un homme discret s'empressa de lui ôter son manteau et lui indiqua une table libre, dans un angle de la salle. Ignorant sa remarque, Bertuccio préféra s'installer sur une des banquettes adossées au mur, bien en vue. Il commanda un verre de vin et s'installa plus confortablement. Le luxe raffiné de l'endroit lui arracha un sourire teinté d'ironie : rien à voir avec la taverne de l'Ours... Les lambris dorés, le bois précieux, les miroirs et les banquettes de velours conféraient à l'endroit une atmosphère intime et chaleureuse.

Son regard s'attarda sur quelques visages. Des gentilhommes élégants, affairés à charmer de jolies dames peu farouches. La seule différence avec les clients de la taverne de l'Ours venait de l'apparente richesse des personnnages, ainsi que de leur language châtié. A qui s'adresser ? Hésitant, il décida finalement d'attendre un peu. D'autres personnes allaient certainement arriver. Plutôt que de s'aventurer à une table voisine, Bertuccio préféra tendre l'oreille et écouter les conversations. On en apprend souvent beaucoup plus ainsi qu'avec une longue conversation...
Revenir en haut Aller en bas
Tannucci
Invité




Le Caffé Florian - Page 2 Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian - Page 2 PerleJeu 25 Aoû - 13:12

Tannuccia écouta avec attention les paroles du médecin et les plaça dans un coin de sa tête afin de ne point les oublier et de pouvoir les noter dans son carnet lors de son retour à la demeure d'Ugo.Il fallait savoir briller et irradier dans ce monde, même avec les rayons des autres, surtout avec les rayons des autres, et, profiter de chaque lumière apportée.La Princesse ne put retenir le sourire qui lui titillait la joue et creusait ses charmantes fossettes lorsqu'il proféra ses adieux emplis de bonté et courtoisie.Oh oui il y en aurait d'autres des discussions, la Princesse allait s'en assurer, le médecin serait allié de poids et elle comptait bien irradier de ses rayons.Quel personnage intéressant, délicieux à l'aura si chaleureuse que nombre de personnes devaient souhaiter rester à ses côtés et partager un bout de route en sa compagnie.

Matteo allait-il le choisir ? Le voilà devant un grand dilemne...Elle lui jeta un coup d'oeil discret, attendant sa réponse, vérifiant que le regard du jeune homme fut placé sur elle.Il semblait la regarder avec étonnement, ainsi sa tirade avait produit l'effet souhaité.Elle s'en félicita.Elle l'imagina tiraillé par deux désirs opposés, l'un était de poursuivre son échange avec le vieux médecin, l'autre d'accompagner la jeune Princesse capricieuse.Peu importait ce qu'il choisirait, ce n'était que par pure politesse qu'elle lui avait proposé de l'accompagner.Elle releva le menton avec défi en toisant Matteo.Qu'il se dépêche de faire son choix, elle ne tenait pas à s'attarder ici.Surtout d'un homme venait d'entrer et que sa personne mourait d'envie de le connaître et que si elle ne partait pas au plus vite elle ne pourrait s'empêcher d'aller s'asseoir à sa table.Elle répondit à Maitre Barrozi en effectuant une gracieuse révérence.

Matteo se leva galamment avant de s'inclinant en une courbette courtoise avant de lui faire ses adieux à son tour.Ainsi il avait choisi le médecin constata-t-elle en souriant.Elle souhaitait ardemment savoir ce qu'il allait en tirer et comment se déroulerait la suite et la fin de cet échange.Tannuccia regarda Matteo un instant interloquée, l'interrogeant du regard lorsqu'il parla du diner, tournant légèrement la tête d'un coup sec tout en fixant matteo.Il ne parlait pas de l'endroit ou il le prendrait, mais indiquait tout de même que les deux jeunes gens demeuraient au même endroit.Puis elle lui adressa un sourire complice avant de s'incliner à nouveau dans une dernière révérence.


"Je vous remercie Messieurs.Effectivement Matteo, nous nous retrouverons tout à l'heure.Bonne fin d'après-midi."

Sur ce la Princesse tourna les talons, salua au passage deux ou trois gentilhommes de sa connaissance avant de pousser doucement la porte du Caffé et de disparaitre dans la foule bruyant, se dirigeant d'un pas décidé et non engageant, vers la demeure des Grazziano.

[Ca'Grazziano - Le Grand Hall - Le Hall]
Revenir en haut Aller en bas
Muzio Barrozi
Médecin
Muzio Barrozi


Nombre de messages : 726
Date d'inscription : 14/05/2005

Le Caffé Florian - Page 2 Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian - Page 2 PerleDim 28 Aoû - 18:45

Muzio suivit la sortie de la Princesse, puis se rassit avec le plus d'aisance possible. Il posa un bras sur la table, et son regard passa sur tous les visages du caffé. Deux jeunes gens -sur qui l'alcool semblait avoir un effet certain-, passaient de la politesse la plus banale à des rires aguicheurs qui ne laissaient aucun doute sur l'avenir de leur soirée. La porte s'ouvrit, fournissant à temps le motif de distraction nécessaire pour se détourner de cette vue quelque peu écoeurante. Un homme solitaire venait de pénétrer dans la salle; son visage promettait un intérêt certain, mais le médecin ne pouvait évidemment inviter qui que ce soit à une table à laquelle il avait lui-même été convié. Telle est la loi de la société. Muzio se résigna donc à poser ses yeux sur le jeune homme qui lui faisait face. Il avait un petit quelque chose dans les traits qui laissait le chirurgien perplexe. Il ne reconnaissait pas réellement cette lueur qui brillait dans ses yeux, il n'aurait su dire à quoi elle était due. Un peu irrité par ce constat d'impuissance, il cligna des paupières et se décida à se montrer un peu plus coopératif dans l'avancée de la discussion.

"Ainsi donc, monsieur Salvanti, vous êtes un habitué de la ville des eaux ?"

Tâtonnement le plus total. Mais après tout, être ainsi complice avec la Princesse devait signifier au moins plusieurs mois de résidence à Venise. Et puis, quelle que soit la vérité, cela permettait d'alléger un peu l'atmosphère en retombant -sans doute quelques instants seulement-, dans un reflet de banalités qui ne pouvaient que le laisser respirer calmement en attendant un éventuel nouvel affront intellectuel.
Revenir en haut Aller en bas
Matteo Salvanti
Homme de Main - Ca'Grazziano
Matteo Salvanti


Nombre de messages : 390
Statut : Assassiné le 5 février 1744 en soirée au Jardin du Castello.
Date d'inscription : 02/05/2005

Le Caffé Florian - Page 2 Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian - Page 2 PerleLun 29 Aoû - 17:51

Matteo suivit la silhouette gracieuse de la Princesse jusqu’à ce qu’elle franchisse la porte avec une pointe de regret. Il savait avoir fait le bon choix, mais ne pouvait s’empêcher de pleurer le départ d’une aussi belle prise. Puis, une fois les deux hommes seuls, le ptit blond appuya ses deux coudes contre la table et fixa son interlocuteur dans les yeux, en se mordillant la lèvre inférieure, d’un air amusé.

« Alors, Maître Barrozi, à nous deux maintenant… »

Il prit une courte pause pour faire son petit effet. C’était son jeu préféré : être innocent et scandaleux à la fois. C’était d’ailleurs pourquoi il était le préféré de bien des gentilshommes et le serviteur de ces dames.

« Un habitué, Monsieur? Pas du tout. En vérité, la Sérénissime jouit de ma présence pour la première fois. Je suis de Naples, moi, Monsieur, et fier de l’être! Mais, je dois avouer avoir été immédiatement séduit par Venise. N'est-ce pas une ville fascinante? Dès que j'y ai posé le pied, elle m'a prédit folles aventures, intrigants mystères et... passions torrides. »

Il gloussa de rire, une lueur indéfinissable dansant joyeusement dans son regard, qui n'avait toujours pas dévié du médecin.

« Et vous, Maître Barrozi? Serait-il indiscret que de m’enquérir de vos origines? Je vous imagine bien… »

Il posa un doigt sur sa lèvre inférieure tout en réfléchissant pour ensuite détailler le médecin de bas en haut sans aucune vergogne.

« … Mmh, voyons voir. Que diriez-vous de… Turin? Calme, plutôt au Nord… quoique près de ces drôles de Français! Milan, peut-être? Allons, éclairez-moi, Maître. Vous me faites languir. »

Le jeune homme appuya sur ce dernier mot d’un air parfaitement candide, même si une note dans son ton démentait son apparente ingénuité. Il entendit une chaise racler contre le sol, signe qu’on venait de s’asseoir. Tournant immédiatement la tête vers le nouveau venu, Matteo fut enchanté par ce qu’il vit. Un grand ténébreux à l’aspect sauvage et farouche, solitaire et dangereux, mais surtout, terriblement excitant. Presque autant que certains Princes de sa connaissance. C’était exactement le genre d’hommes qu’il aimait dérider et provoquer jusqu’à ce qu’ils perdent toute méfiance. Le garçon observa l’inconnu pendant quelques instants, délibérant intérieurement. Devait-il l’inviter à leur table? L’homme ne semblait attendre d’invité, à en juger par la manière dont il tendait l’oreille aux alentours, à la recherche d’une conversation qui meublerait l’absence de la sienne. Et qu’en dirait le médecin? L’homme de main reporta son attention sur ce dernier et finit par hausser les épaules. Peu importe. Il voulait cet étranger affriolant à sa table et il l’aurait.

Se levant d’un bond, Matteo s’approcha de l’inconnu et s’arrêta à trois pas de lui. S’inclinant profondément, il fit sa proposition avec un sourire charmeur :


« Monsieur, vous semblez bien seul à votre table. Un homme de votre prestance doit absolument trouver compagnie! Nous feriez-vous l’honneur de vous joindre à nous? Il est, bien entendu, certain que nulle offense ne suivrait votre refus. »
Revenir en haut Aller en bas
Bertucci
Invité




Le Caffé Florian - Page 2 Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian - Page 2 PerleLun 29 Aoû - 20:48

Bertuccio commençait à s'ennuyer ferme. Ce qu'il avait perçu jusqu'ici n'avait rien de palpitant ou d'instructif, loin de là ; les conversations oiseuses des dandys et de leurs conquêtes commençaient à irriter ses oreilles...
Il commençait à peser le pour et le contre d'un départ du caffé dans les plus brefs délais lorsqu'il se vit accoster par un petit blondinet aux airs délurés.


« Monsieur, vous semblez bien seul à votre table. Un homme de votre prestance doit absolument trouver compagnie! Nous feriez-vous l’honneur de vous joindre à nous? Il est, bien entendu, certain que nulle offense ne suivrait votre refus. »

*Une occasion de s'informer à ne pas manquer...* songea l'aventurier.

"Monsieur, votre invitation tombe à point ! Comme vous avez pu le remarquer, je manque cruellement de compagnie, et j'ai tout lieu de croire que je n'aurai pas à regretter la vôtre..."

La flagornerie n'était pas dans la nature de Bertuccio, mais il savait en user à bon escient. Et pour l'homme qui lui faisait face, un peu de flatterie ne devait pas être de trop...
Il se leva et suivit le petit blond jusqu'à sa table, où se trouvait déjà un autre homme, d'un tout autre genre que son hôte : d'une apparence somme toute anodine, mais dont le visage respirait l'intelligence. Une allure posée, un regard profond qui vous mettait à nu et qui semblait vous détailler comme un patient dont il s'agit de trouver la maladie. De toute évidence, un homme d'agréable compagnie, dont il s'agirait cependant d'éviter le regard... Mais l'aventurier savait camoufler ses pensées et n'en laisser paraître que ce qu' il lui plaisait de laisser voir...
Bertuccio le salua et s'installa entre les deux hommes.


"Messieurs, je vous suis reconnaissant de me tirer de ma solitude. J'espère vous être d'agréable compagnie..."


Dernière édition par le Mar 30 Aoû - 21:31, édité 1 fois
Revenir en haut Aller en bas
Muzio Barrozi
Médecin
Muzio Barrozi


Nombre de messages : 726
Date d'inscription : 14/05/2005

Le Caffé Florian - Page 2 Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian - Page 2 PerleMar 30 Aoû - 13:11

Décidément, le sieur Salvanti était un drôle d'homme. A l'énoncé des 'passions torrides' qu'il aurait sans doute dû sentir dans l'air, Muzio se demanda très naïvement sur quel oiseau il était tombé. Un moment il crut élucider la nature de la lueur des pupilles de Matteo, mais il s'efforça de rejeter l'hypothèse aux oubliettes et garda un air impassible. Néanmoins il tenta d'avoir l'air un peu passionné pour parler de Venise - c'était là un sujet innocent, normalement...-. Bien entendu, il ne fit aucune allusion au quartier qu'il venait de quitter, et dont le souvenir faisait monter en lui une bouffée de colère et de déception.

"En effet, cette ville ne m'a en rien déçu; elle possède véritablement les merveilleuses qualités qui lui sont prêtées en province. Car c'est bien de province que j'arrive, non loin de Turin comme vous l'aviez pressenti... Sans doute le calme du Nord me convient-il en effet."

Evoquer le nom d'un village aurait sans doute été mal placé, d'autant plus pour confier le berceau de son enfance à un inconnu aux finalités pas très claires. Le médecin allait ajouter quelque banalité sur le contraste existant entre la province et la Sérénissime lorsqu'il s'aperçut que son interlocuteur se distrayait déjà de sa compagnie. Quelque peu irrité, il suivit le blondinet des yeux, mais son agacement s'apaisa quand il se rendit compte de l'identité de l'invité. Lui avait été également attiré par cet homme aux allures farouches. Etrange hasard !
Ce fut donc avec curiosité que Muzio accueillit le nouvel arrivant et qu'il le dévisagea dans les limites de la politesse avant de répondre d'un ton qui se voulait désinvolte et mondain -ce qui fut plus ou moins réussi, plutôt moins d'ailleurs; le chirurgien ne savait trop encore dissimuler sa scientificité posée-.


"Ne l'espérez pas, soyez-en certain. Muzio Barrozi..." ajouta-t-il pour toute présentation.

Avisant le verre de vin à moitié plein abandonné sur la table que l'homme venait de quitter, le médecin appela d'un geste un serveur et désigna le nouvel hôte de Salvanti, en profitant pour détailler ce dernier (l'hôte) de ses yeux intéressés. En bonne santé apparemment...


"Qui avons-nous l'honneur d'avoir à notre table ?" demanda-il enfin, se surprenant lui-même de cette invite.
Revenir en haut Aller en bas
Matteo Salvanti
Homme de Main - Ca'Grazziano
Matteo Salvanti


Nombre de messages : 390
Statut : Assassiné le 5 février 1744 en soirée au Jardin du Castello.
Date d'inscription : 02/05/2005

Le Caffé Florian - Page 2 Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian - Page 2 PerleMer 31 Aoû - 18:18

Matteo rosit de plaisir au compliment que lui adressa le bel inconnu. Décidément, son goût était sûr. Il avait tout de suite su avec quel genre de gentilhomme il aurait affaire. Cet homme était tout sauf un rustre. Il était certain que sa présence au Caffé Florian devine une bourse plus ou moins pleine, mais de nos jours, même le petit bourgeois arrivait à s’introduire dans les salons. Mais ce séduisant étranger savait s’exprimer autrement que par des borborygmes incompréhensibles ou des monosyllabes. Il combinait charme sauvage et exquise courtoisie! N’était-ce pas merveilleux?

Le jeune homme reconduit son hôte à la table qu’il partageait déjà avec Maître Barrozi. Aux paroles de l’inconnu, il s’empressa de répondre :


« Mais Monsieur, votre compagnie nous plaît d’ores et déjà, je puis vous l’assurer! »

Après tout, le petit blond ne pouvait qu’apprécier un homme qui le flattait. Il allait s’enquérir du nom du nouvel objet de ses attentions, lorsque le médecin le devança, étonnant le garçon par sa promptitude. Ainsi, l’homme de sciences était aussi intéressé que lui par le nouvel arrivant? Ses lèvres se retroussèrent en une petite moue boudeuse. Matteo n’aimait la compétition que lorsqu’il se savait gagnant. Son regard azur se posa sur le visage du chirurgien. Était-il en mesure de rivaliser avec lui, qui aurait pu se faire courtisan si ce n’avait été du Prince Ugo? Certainement pas. Il redevint tout sourire et, pendu aux lèvres de leur interlocuteur, attendit sa réponse avec une curiosité avide.
Revenir en haut Aller en bas
Bertucci
Invité




Le Caffé Florian - Page 2 Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian - Page 2 PerleMer 31 Aoû - 21:18

Bertuccio s'était aperçu de l'effet de son compliment sur le jeune homme ; il ne douta plus d'avoir employé la bonne méthode. Mais les joues rosées de son interlocuteur faisaient songer l'aventurier à un enfant rosissant sous un compliment, ce qui le rendait quelque peu mal à l'aise.

Bertuccio faillit sourire en entendant la phrase d'accueil du sieur Barrozi. A son ton légèrement hésitant, il avait deviné que l'homme n'avait pas l'habitude des conversations mondaines. Il s'en réjouit intérieurement : un homme pas encore perverti par les petits complots qui se jouaient dans les salons devenait de plus en plus rare. Quant à son hôte, il était à l'évidence son exact contraire, s'il en jugeait par sa réponse qui alliait aisance et flatterie.

Un serveur arriva quasi instantanément, répondant à un geste de Barrozi. Bertuccio commanda un autre verre de vin chaud, boisson qu'il appréciait décidément de plus en plus ! Il mit cela sur le compte de la froidure du dehors...

Il remarqua la moue boudeuse du petit blond au visage d'ange lorsque Barrozi lui demanda son nom. Sûrement était-il sur le point de s'en enquérir lui-même ? Cet empressement à son endroit l'amusa mais il n'en laissa rien paraître.


"Bertuccio Farieli..." répondit sobrement l'aventurier à la question de son interlocuteur. "Et maintenant que nous nous sommes présentés, M. Barrozi, j'aimerais connaître le nom de mon hôte..." continua-t-il en se tournant vers ce dernier. Tout en attendant sa réponse, Bertuccio le détailla, d'un regard attentif, aussi longtemps que la politesse le lui permit. Un visage aux airs presque enfantins, des yeux bleus prêts à charmer, des lèvres roses que l'on imaginait autant embrasser que mordre, mais qui pour le moment ne semblaient pas disposées à autre chose qu'à laisser échapper des paroles suaves. Une voix flûtée, qui partait quelquefois dans les aigües. Des cheveux d'un blond très pâle. On lui aurait donné le bon dieu sans confession, le prenant pour un ange ! Mais Bertuccio avait assez d'expérience pour savoir que le physique n'était pas forcément le reflet de l'âme...
Revenir en haut Aller en bas
Muzio Barrozi
Médecin
Muzio Barrozi


Nombre de messages : 726
Date d'inscription : 14/05/2005

Le Caffé Florian - Page 2 Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian - Page 2 PerleJeu 1 Sep - 11:38

Le sieur Farieli semblait tout à fait accaparé par l'observation du jeuneot. Ce constat fait, Muzio put l'étudier à son aise. Drôle de monde que cette société où les hommes sont réduits à s'observer à la dérobée, croyant déceler en leurs semblables toutes sortes de fantasmes... Mais, que cela lui plaise ou non, le médecin devait se résigner à les imiter, ne serait-ce que pour reprendre plus tard sa véritable personnalité.

Ainsi donc, Bertuccio usait de la flatterie. Etrangement, on n'aurait pas cru cela en se fiant à son allure qui semblait somme toute plutôt franche et fonceuse que mielleuse et caressante. Mais peut-être cet homme jouait-il le même jeu que lui-même ? Las, Muzio détourna son regard sur Matteo. Celui-ci avait semblé vexé de ne pas avoir eu le privilège de demander son nom à son hôte. Muzio en ressentit une étrange bouffée de contentement qu'il n'aurait su expliquer. Son goût acide trahissait sans doute que la perversion pénétrait en lui... Déjà !

Le chirurgien se reprit et entreprit d'étudier soigneusement le ton et les fioritures de la réponse de Salvanti qui n'allait pas tarder. Celle-ci l'enseignerait avec fidélité, et peut-être livrerait-elle un soupçon des intentions et sentiments de son propriétaire... ce que Muzio attendait avec une patience reine.
Revenir en haut Aller en bas
Matteo Salvanti
Homme de Main - Ca'Grazziano
Matteo Salvanti


Nombre de messages : 390
Statut : Assassiné le 5 février 1744 en soirée au Jardin du Castello.
Date d'inscription : 02/05/2005

Le Caffé Florian - Page 2 Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian - Page 2 PerleSam 3 Sep - 8:08

Des plusieurs étapes cruciales composant une conversation, l’introduction était toujours la partie que Matteo préférait. Il déclinait son identité d’une manière qui dépendait de son interlocuteur, des circonstances et de son humeur du jour. Il va sans dire qu’il se présentait avec moult ornement, pour son propre divertissement comme pour celui de son auditoire. À ce moment précis, le garçon se sentait plus théâtral qu’il ne l’avait jamais été, d’un faste digne de sa ville d’adoption. En plus d’épouser son humeur à merveille, ses paroles lui permettraient de détourner l’attention de ses interlocuteurs de ce sur quoi il ne souhaitait s’étendre. Sa loyauté au Prince Ugo di’Grazziano, par exemple.

Se délectant des regard convergeant dans sa direction, le blondinet savoura cet instant de gloire d’un air ravi, avant de s’enquérir tout haut, une expression malicieuse clairement affichée sur son visage :


« Qui suis-je, moi? Voilà une question fort épineuse à laquelle plusieurs ont tenté de répondre, Monsieur Farieli, mais qu’aucun n’a réussi à élucider! »

Il gloussa, ses yeux espiègles épiant les réactions de ses invités :

« Certains me voient comme un simple mignon, d’autres rien de plus qu’un vilain garnement! D’autres encore, me pensent gentilhomme ou homme d’épée… mais je vous l’affirme haut et fort en ce jourd’hui, ils ont tous tort! »

Son débit de voix se fit plus rapide, sa voix plus aiguë, ses gestes plus vifs, comme à chaque fois que son discours lui donnait des ailes :

« Je suis… la rougeur sur la joue des dames, la flamme dans les prunelles des nobles! La saveur exotique de vos plats les plus raffinés et le goût exquis de ce vin de Chypre! La lame dans la nuit tout comme la dague portant le coup de grâce! Je me fais défenseur des jouvenceaux, ravisseur des cœurs ; champion des beaux jeunes et des jeunes beaux ; amoureux de la vie et des femmes ; chevalier des temps perdus ; amant éternel, Apollon immortel… Je suis l’Apôtre des plaisirs, le Sauveur des libertins! »

Il prit une grande inspiration avant de conclure avec un grand sourire :

« J’ai dit… Matteo Salvanti! »

Le garçon se tut un moment, le temps que sa tirade fasse son effet pour ensuite pouffer de rire. Cette fois-ci, il s’était surpassé. Il lui faudrait s’octroyer un présent digne de lui. Son regard caressa la mâchoire carrée de l’aventurier, puis le visage calme et lisse comme l’onde du médecin. Lequel s’offrir? Un sourire coquin lui vint aux lèvres. Mais pourquoi se priver? Il y avait tout à fait moyen d'en avoir non pas seulement un, mais bien les deux à la fois! Il passa lentement sa langue sur ses lèvres rosées, recueillant les gouttes de vin les humectant toujours, ses yeux s'agrandissant à mesure qu'il sentait l'excitation naître en lui.

Mais s'il les voulait tous deux, il fallait avant les conquérir et pour cela, il fallait en revenir aux principes de base d'une discussion mondaine.

Des plusieurs étapes composant une conversation, l’échange de banalités était la partie qui ennuyait le plus Matteo. Elle était pourtant inévitable et souvent, hautement utile. Sans parler du fait qu’elle était immédiatement suivie par la phase de séduction, qui se terminait bien souvent dans sa couche. C’est pourquoi, se résignant grâce à la perspective des deux hommes seulement pour lui, le jeune homme reprit la parole :


« À présent que nous sommes tous familiers l’un à l’autre, voici venu mon tour de poser une question, Monsieur Farieli. Je suis curieux, voyez-vous? Il est tout à fait naturel, même souhaitable, que vous soyez de même, comme j’adorerais approfondir notre connaissance mutuelle, susurra-t-il. Qu’est-ce qui vous a donc mené à Venise, Monsieur Farieli? Affaires? Affaires… de cœur? »
Revenir en haut Aller en bas
Bertucci
Invité




Le Caffé Florian - Page 2 Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian - Page 2 PerleSam 3 Sep - 17:58

Bertuccio ne s'attendait pas à une réponse aussi théâtrale, aussi fut-il quelque peu déconcerté...Néanmoins son étonnement ne dura qu'une fraction de seconde, et la flamme de surprise qui avait brèvement luit dans ses yeux s'évanouit aussi vite qu'elle était apparue.

*Décidément, ce Salvanti est un drôle d'oiseau...*

Son interlocuteur semblait ravi de l'effet produit. L'aventurier se demanda ironiquement s'il n'aurait pas été poli d'applaudir...

*Apôtre des plaisirs, sauveur des libertins !*

D'après la manière dont Salvanti le carressait du regard, il pouvait penser que celui-ci n'était pas seulement "amoureux des femmes"...

Affaires de coeur ? Cette tentative d'incursion dans un domaine qui tenait de sa vie privé l'énerva prodigieusement. Il avait l'habitude de ce genre de personnage, curieux jusqu'au vice, qui n'était malheureusement pas rare. Mais les questions d'ordre personnel qui lui étaient adressées n'avaient jusqu'ici jamais réussi à obtenir de confidences...et il n'entendait pas faire exception à la règle, cette fois-ci pas plus qu'une autre. L'aventurier prit son temps pour répondre à la dernière question du jeune homme, prenant un malin plaisir à le faire languir.


"Quel dommage que je ne sois pas d'une nature aussi curieuse que la vôtre !" répliqua-t-il au sieur Salvanti.

Il tempéra cette réplique un peu froide par un sourire aimable, bien que distant. Il ne tenait pas à se mettre le jeune homme à dos, en tout cas pour le moment. Et il lui fallait user de patience pour arriver à tirer de lui quelques informations qui l'éclaireraient sur la posture à prendre dans cette ville bruissante de complots...
Il se résigna donc à continuer le commencement de discussion mondaine qu'avait entamé Salvanti.


"Mais je peux néanmoins satisfaire votre curiosité...dans une certaine mesure. Aucune affaire particulière n'est la cause de ma présence à Venise, si ce n'est celle d'un constant besoin de découverte. Je ne tiens pas en place, monsieur Salvanti, et il est bien certain que lorsque l'envie m'en prendra, je quitterai cette ville sans un regret...Mais nous n'en sommes pas là pour le moment." continua-t-il.
"Vous-même, êtes-vous ici en simple voyageur de passage, ou bien établi durablement dans l'enceinte de la Sérénissime ? Cette question vous est également adressée, Monsieur Barrozi... reprit-il en se tournant vers le chirurgien, d'un air engageant. Si tel est le cas, peut-être pourriez-vous m'éclairer quant aux "coutumes" vénitienne..."

Il arrêta là sa tirade et attendit patiemment une réponse de la part des deux hommes. Deux points de vue différents étaient toujours intéressants.
Revenir en haut Aller en bas
Graziella Rivieri
Courtisane
Graziella Rivieri


Nombre de messages : 113
Date d'inscription : 03/09/2005

Le Caffé Florian - Page 2 Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian - Page 2 PerleSam 3 Sep - 18:20

[Premier post]

Graziella était aux anges. Cette ville était merveilleuse et comblait tous ses espoirs. Elle ne s'y était établie que très récemment mais n'avait pu guère sortir tant que tout chez elle n'avait pas été parfaitement en ordre. Cela faisait plus d'une heure qu'elle arpentait seule les rues de Venise, profitant de ce moment de repos. Mais le froid qui commençait à se faire sentir la poussa vers les portes du Caffé Florian.

Entrant dans l'établissement de sa séduisante démarche, elle fit glisser sa cape sur ses épaules blanches et remercia le valet qui la récupéra. Graziella portait une riche robe à corsage cintré et aux mutliples découpes. Le décolleté rond laissait entrevoir sa poitrine généreuse et quelques boucles d'un roux flamboyant savamment échappées de sa coiffure s'amusaient à frôler ses épaules ornées de dentelles. Sa jupe était légèrement plus longue dans le dos, ce qui rendait sa démarche plus raffinée encore. Cette robe confectionnée de deux tons de taffetas bleu faisant ressortir ses yeux clairs.

Personne ne savait qui elle était dans cette ville et encore moins dans ce caffé, mais cela ne durerait pas très longtemps, elle en était persuadée. Son regard de perle glissa sur l'assemblée et remarqua d'ores et déjà trois hommes qui lui seraient d'excellente compagnie. Elle avait pris une petite bourse d'argent mais si un verre lui était offert, cela ne serait que mieux.

Elle s'avança donc dans la salle, d'un pas lent, un doigt sur ses lèvres rouges, feignant chercher une place de libre l'air ennuyé. Elle se demandait combien de temps il faudrait à l'un des hommes pour tomber dans le piège de son corsage tentateur.
Revenir en haut Aller en bas
Muzio Barrozi
Médecin
Muzio Barrozi


Nombre de messages : 726
Date d'inscription : 14/05/2005

Le Caffé Florian - Page 2 Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian - Page 2 PerleSam 3 Sep - 20:55

Muzio fixa Salvanti d'un oeil morne pendant tout le temps que dura sa présentation aux mille fioritures. Ce gamin semblait prendre un délicieux plaisir à s'exprimer ainsi rhétoriquement, tandis que le médecin ne voyait là que pure présomption. D'ailleurs, la définition qu'il s'attribua de lui-même aggrava son cas aux yeux de Muzio. Ce dernier s'appliqua à rester parfaitement indifférent après la tirade de l'Apollon immortel. Lorsque la discussion prit une tournure plus banale, il retomba dans l'ennui mais se sentit plus à l'aise, compensation non négligeable dans une situation où il devait paraître décontracté.

Néanmoins, il surprit nettement la jouissance mentale qu'éprouvait Matteo en fixant ses interlocuteurs. Une sonnette d'alarme retentit dans le crâne du médecin: l'interprétation de la fameuse lueur auparavant n'était donc pas erronée ! Sans aucun signe précurseur, Muzio fut brusquement pris d'une immense envie de rire, ce qui ne lui était pas arrivé depuis plusieurs mois... Il s'efforça de respirer calmement pour calmer ce dangereux caprice de la nature, mais que diable, l'idée qu'un libertin blondinet napolitain essayant de le séduire, lui le scientifique campagnard, oui cette idée était du domaine du haut comique !

Par pure politesse, il répondit brièvement aux interrogations de Farieli:


"Pour ma part, je suis arrivé très récemment. Mais, en tant que médecin de la ville, j'imagine y rester quelques temps. Je me permets d'ailleurs de vous assurer mon dévouement si tant est que vous ayez besoin de mes services." ajouta-t-il par habitude, l'homme semblant robuste.

Une magnifique jeune femme apparut à ce moment-même dans le caffé. Le regard de Muzio s'y attacha, puis, ce réflexe ne lui étant pas familier, s'en détourna naturellement. Néanmoins, il avait vu ses yeux briller de convoitise envers leur table -et sans doute ses occupants-, et ne doutait plus que Salvanti réussirait à l'y attirer. Quatre proies en l'espace de quelques minutes, quel choix pour le sauveur des libertins !

Un sourire très franchement amusé se posta sur les lèvres du chirurgien, et ses yeux s'allumèrent comme rarement ils le faisaient, trahissant l'hilarité totale de Muzio.


"Quant aux coutumes de la Sérénissime, monsieur Farieli, je puis déjà vous assurer qu'elles sont d'un piquant surprenant !"
Revenir en haut Aller en bas
Matteo Salvanti
Homme de Main - Ca'Grazziano
Matteo Salvanti


Nombre de messages : 390
Statut : Assassiné le 5 février 1744 en soirée au Jardin du Castello.
Date d'inscription : 02/05/2005

Le Caffé Florian - Page 2 Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian - Page 2 PerleDim 4 Sep - 17:35

L’ennui commençait déjà à gagner Matteo. Si un instant plus tôt, il n’aspirait qu’à charmer ses interlocuteurs, son esprit facilement distrait rêvait à présent d’un nouveau divertissement. Il en avait toujours été ainsi avec lui. Toujours en mouvement, toujours à aller de l’avant en laissant derrière lui quoiqu’il ait pu entamer, mais sans jamais évoluer. Il avait conservé cette façon de penser enfantine, dictée par ses humeurs et caprices, déterminée par deux pôles qui le guidaient en tout temps : le plaisir et l’ennui. C’est ainsi que ses plus récentes conquêtes et ses biens les plus précieux avaient été abandonnés pour n‘être réduits qu’à l’état de simples amourettes et babioles inutiles. Tout n’était que passade : celle qui croyait être son âme sœur se révélait vite n’être qu’une toquade de plus. Tout pouvait être remplacé : le beau du jour était différent de celui d’hier et de demain.

Son regard limpide balayait le Caffé en quête d’une personne digne d’intérêt, ses doigts pianotant impatiemment sur la surface lisse de la table. Il n’écoutait qu’à demi les paroles échangées entre les deux hommes, ses pensées vagabondant de table en table.

La brune à sa droite était soucieuse ; si sa bouche était rieuse, ses yeux l’étaient beaucoup moins. Qu’est-ce qui pouvait bien la tourmenter? L’homme assis au fond, peut-être? Il la regardait avec une bien étrange insistance. Liaison secrète ou sordide histoire de chantage? Une chose de sûre, l’époux paraissait bien peu commode. Pas étonnant que la jeune femme soit aussi nerveuse.

Un serveur renversa un café bouillant sur un corpulent bourgeois. Son visage violacé était disgracieux. Matteo dévia son regard vers le petit groupe attablé près de la porte. De jeunes aristocrates, sans doute. Celui assis en retrait était des plus attrayants. Ses cheveux bouclés semblaient si doux au toucher… et puis, cette bouche…

La porte s’ouvrit, attirant aussitôt son attention si vite détournée, pour révéler Venus dans toute sa splendeur. Le blond cligna des yeux, s’attendant presque à ce que, tel une sirène, elle commence à chanter et séduise ainsi tous les hommes présents dans la pièce. La femme brune et ses inquiétudes, le serveur et le bel aristocrate avaient disparu, ne restait que cette enchanteresse… qui semblait chercher une table. Matteo prit sa coupe entre ses mains et la vida d’un trait avant de se lever pour se diriger vers la jeune femme.
S’inclinant bien bas devant elle, il susurra de sa voix la plus enjôleuse :


« Madame, m’abuserais-je ou seriez-vous en quête de compagnie? Il serait impensable pour un gentilhomme de ma condition que de laisser une dame de votre qualité à elle-même… tout comme il serait impensable pour tout homme de raison que de ne point inviter à sa table une femme de votre beauté. »
Revenir en haut Aller en bas
Bertucci
Invité




Le Caffé Florian - Page 2 Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian - Page 2 PerleDim 4 Sep - 21:02

L'ennui que manifestait Matteo n'échappa pas au regard observateur de Bertuccio. Ainsi, le sieur Salvanti se désintéressait déjà de lui et du médecin ? Mais au profit d'une charmante créature, qu'il avait vu entrer d'une démarche gracieuse... La jeune femme, élegamment vêtue, jetait des regards appuyés en direction des trois hommes depuis qu'elle était entrée dans le caffé, cherchant, sans se cacher, à se faire inviter à leur table. Il devina que Matteo n'allait pas se priver de satisfaire la belle, trouvant ainsi une agréable distraction.

Le jeune homme, dès qu'il aperçut l'adorable créature, s'empressa d'ailleurs de vider son verre et d'aller lui adresser la parole, confirmant les pensées de Bertuccio. Cela ennuya quelque peu l'aventurier, qui avait espéré que le blondinet satisferait sa curiosité et lui délivrerait d'intéressantes informations. Mais lui restait cependant le médecin, dont la conversation pourrait s'avérer instructive.


"Quant aux coutumes de la Sérénissime, monsieur Farieli, je puis déjà vous assurer qu'elles sont d'un piquant surprenant !"

La réplique du médecin piqua d'intérêt l'aventurier, plus qu'elle ne l'étonna. La réputation de Venise n'était pas surfaite, et il était à présent plongé dans cette atmosphère particulière de mystères, de secrets et de rancunes cachées qui baignait la Sérénissime.


"Vos paroles méritent d'être un peu plus commentées." répondit l'aventurier. "Mais cela devra attendre, car je crois qu'il faut nous préparer à accueillir une nouvelle invitée..." poursuivit-il en regardant Matteo opérer une habile tentative d'approche de la nouvelle arrivante.
Revenir en haut Aller en bas
Graziella Rivieri
Courtisane
Graziella Rivieri


Nombre de messages : 113
Date d'inscription : 03/09/2005

Le Caffé Florian - Page 2 Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian - Page 2 PerleLun 5 Sep - 11:49

Et voilà le beau poisson qui venait de mordre à l'hameçon, quel régal, surtout lorsque celui-ci était plaisant à regarder. Graziella avait vu le regard des deux autres hommes se poser sur elle mais sans insistance, pas intéressés ? Ou peut-être timides ? Peu importait, pour ses débuts dans cette ville, autant se contenter d'une proie facile.

La présentation de l'homme et sa voix charmante l'invitant à sa table la fit sourire. C'était si simple et surtout... si plaisant. Graziella aimait cela par-dessus tout.

Gardant son sourire et s'inclinant grâcieusement, elle tendit le dos de sa main délicate vers Matteo tout en répondant.


"J'accepte votre invitation avec grand plaisir monsieur... gentilhomme." dit-elle avec un sourire en coin pour lui signaler qu'il ne s'était pas pésenté. Puis murmurant plus bas à l'adresse seule de son séduisant compagnon, elle rajouta. "Il est tellement difficile pour une dame seule de trouver un peu de compagnie... surtout lorsqu'elle vient tout juste de s'installer dans une aussi belle ville que Venise..."
Revenir en haut Aller en bas
Muzio Barrozi
Médecin
Muzio Barrozi


Nombre de messages : 726
Date d'inscription : 14/05/2005

Le Caffé Florian - Page 2 Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian - Page 2 PerleLun 5 Sep - 23:02

Muzio en aurait pleuré de rire et de déception. Le sauveur des libertins était finalement bien trop caricatural, donc bien trop prévisible... Le médecin s'efforça de prendre un air blasé lorsque Salvanti aborda la belle avec ses manières habituelles. Celle-ci n'attendait que cela pour s'installer à leur table, bien entendu. Leur petit jeu se finirait sans doute au creux d'un oreiller... Quel manque notoire de romantisme !

Les deux jeunes gens se trouvaient encore trop loin de la table pour que Muzio puisse intervenir en galant homme qu'il s'efforçait d'être, aussi se contenta-t-il d'observer une fois de plus la clientèle du caffé. Les rires de gorge et les oeillades commençaient sérieusement à l'horripiler... Il se retourna alors vers l'aventurier et le reprit brusquement à ses derniers mots:


"Une nouvelle invitée, oui... Charmante d'ailleurs..." commenta-t-il d'un air distrait, feignant de se désintéresser totalement de la question.
Revenir en haut Aller en bas
Gianni D
Invité




Le Caffé Florian - Page 2 Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian - Page 2 PerleMar 6 Sep - 1:30

Cinqs doigts couverts de velours pourpre vinrent pousser la porte du Caffé.
Les odeurs exquises et généreuses flattèrent les papilles du Gentilhomme qui venait de faire son entrée, accompagné d'un jeune éphèbe de 18 ans.

Lorsque il sentit les parfums divers et alléchants, le Maître d'Armes ne pu s'empecher de regretter l'accord passé avec Orfeo, stipulant qu'ils ne prendraient qu'une légère collation, et son estomac le lui reprochera amérement.

C'est donc d'humeur plutôt maussade, l'effet de l'alcool s'étant depuis quelques temps deja dissipé, qu'il scruta le Caffé à la recherche d'une table.

Ne voyant aucun garçon venir à leur rencontre, il se fit un peu plus grincheux


-" Orfeo... si tu essayais de nous trouver une table ?"
Revenir en haut Aller en bas
Orfeo Ciriaco
Saltimbanque
Orfeo Ciriaco


Nombre de messages : 81
Date d'inscription : 02/09/2005

Le Caffé Florian - Page 2 Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian - Page 2 PerleMar 6 Sep - 16:46

[les Chevaux de St Marc]

Orfeo pénêtra à la suite du Maître d'Armes dans le Caffé. Aussitôt, les odeurs l'assaillirent. Parfums capiteux des femmes, fumets des mets servis aux tables, effluves lourdes des spiritueux. La chaleur aussi le surprit, tellement étouffante après la froidure du dehors. Ses doigts le brûlèrent comme après avoir touché la neige. Un serveur passa devant lui, le repoussant du coude vers la porte pour se faire un passage, lourdement chargé d'un grand plat sur lequel trônait une volaille rotie à la peau dorée et craquante. Le bruit incessant des conversations, les rires hauts des femmes, les voix avinées des hommes lui emplirent la tête d'un écho assourdissant. Désorienté par l'afflut de sensations, le garçon avala difficilement l'afflut de salive qui envahit sa bouche, réprimant une nausée.

Livide soudain, les repas manqués se rappelèrent à son bon souvenir et un vertige l'obligea à prendre appui sur le dossier d'un siège. L'occupant le repoussa en grognant et le garçon fit un pas en arrière, titubant sur ses jambes en coton.
D'une voix blanche, un brouillard épais devant les yeux, il n'eut que le temps d'une phrase d'espoir avant de se sentir happé par un trou noir et de finir écroulé à genoux, son paquetage s'accrochant dans sa chute aux jupes d'une grande et belle femme rousse
.

"Il y aura peut-être du pain pour tremper la soupe."
Revenir en haut Aller en bas
Contenu sponsorisé





Le Caffé Florian - Page 2 Empty
MessageSujet: Re: Le Caffé Florian   Le Caffé Florian - Page 2 Perle

Revenir en haut Aller en bas
 
Le Caffé Florian
Revenir en haut 
Page 2 sur 6Aller à la page : Précédent  1, 2, 3, 4, 5, 6  Suivant
 Sujets similaires
-

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
VENISE :: ENTRE NOUS :: LA CITE :: Place Saint Marc-
Sauter vers:  
Ne ratez plus aucun deal !
Abonnez-vous pour recevoir par notification une sélection des meilleurs deals chaque jour.
IgnorerAutoriser